dimanche 21 septembre 2025

Sur un air de biniou



Cassandre venait de sortir du four ses fars bretons réalisés en mémoire de sa chère Lydie lorsque le heurtoir mis en branle par un visiteur la fit sursauter.

Son voisin, sourire aux lèvres, un bouquet de fleurs composé savamment par la fleuriste Rose Alban en mains, l’assura de son estime.

«  J’ai entendu parler de vos travaux et lors de mon prochain déplacement à Cambrai, j’achèterai quelques ouvrages traduits par vos soins afin de mieux connaître votre univers ».

Cassandre sourit poliment et lui proposa une part de far breton.

« Avec plaisir ! Il y a longtemps que je n’ai pas goûté ce délice dont raffolait mon père Hervé Desvallées. Il appartenait au Bagad de Lann Bihoué ; lors d’un déplacement avec son régiment dans le Pays Basque, il est tombé amoureux de ma mère Maïté Etcheverry et il l’a épousée. Je suis donc le produit de leurs amours. Breton et Basque par moitié, voilà un singulier mélange ! J’ai appris à jouer du biniou et je fabrique des espadrilles comme le faisait ma mère dont c’était la profession. Mes parents ne sont plus de ce monde car ils ont disparu tragiquement dans un accident ferroviaire ; je suis certain qu’ils vous auraient appréciée. Votre far breton est un délice » conclut-il, laissant Cassandre lui en servir une autre part.

Heureuse de ne pas avoir besoin de tenir la conversation, son far breton parlant pour elle, Cassandre se contentait de verser le café dans de jolies tasses de porcelaine de Limoges et de sourire.

Iban finit par exposer le but de sa visite, l’invitation à participer à la fête qu’il comptait donner pour remercier les habitants de la commune de leur accueil.

«  Vous pourrez voir les espadrilles que je fabrique et j’espère que l’une de ces paires exposées vous plaira. Je peux également, à la commande, créer un motif personnel qui vous singularisera » et il ajouta que Victor souhaitait voir apparaître sur les siennes un accordéon et une tasse à café.

Cassandre ne put s’empêcher de rire et elle précisa que pour sa part, elle n’exigerait pas la reproduction d’une pagode ou d’un pont à la chinoise voire d’une geisha.

«  Je suis sûre que l’un des motifs que vous avez créés me plaira » dit-elle aimablement et elle reconduisit le jeune homme à la porte en l’assurant de sa venue.

Demeurée seule, elle débarrassa rapidement la table des reliefs pâtissiers, lava les tasses et la cafetière et se sentit soulagée d’avoir vraisemblablement un voisin qui ne devrait pas poser de problèmes.

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire