mardi 30 novembre 2021

Un prince légendaire

 

En se réincarnant dans le corps svelte du prince légendaire aux amours doubles qui erre sur les bords du lac des cygnes, l’âme de Johnny fit jaillir des pépites musicales inouïes.

Hésitant sans cesse entre deux rivales, le cygne blanc et le cygne noir, tour à tour charmeuses et ensorcelantes, le prince, alias Johnny, s’adressa à un musicien en proie aux mêmes tourments et lui commanda une chanson.

C’est ainsi que naquit, sous la plume et sur les notes du clavier de Michel Berger, l’inoubliable chanson Quelque chose de Tennessee.

Sublimée dans la chanson Gabrielle qui conquit tous les cœurs et fut à l’initiative d’une gestuelle intime et amoureuse, passionnée, l’âme double de Johnny, oscillant entre deux amours qui n’en faisaient qu’un mais se dérobaient sans cesse dans une improvisation rituelle chaque fois renouvelée, se convertit en une chaîne de cœurs irréversibles, tournés vers l’amour fou et la conquête de la fleur de légende, celle du lac des cygnes, qui cherche son prince pour l’honorer à tout jamais.

dimanche 28 novembre 2021

La pie aux yeux bleus

 

En se mirant dans les eaux d’un lac aux reflets turquoise, une pie se retrouva pourvue d’yeux bleus, ce qui fit d’elle une diva.

Elle vola d’arbre en arbre, cherchant des émeraudes ou des rubis nichés dans des corbeilles de brindilles tressées et elle finit par découvrir un magnifique saphir qu’elle porta en pendentif pour égayer son plumage demi-deuil.

Sortant de sa chaumière, panier au bras, la belle Graziella partit à la recherche de champignons et de fruits sauvages, nèfles, noisettes et baies dont elle ferait des tourtes et des gâteaux.

De son côté, un prince chevauchait en espérant rencontrer la femme de ses rêves.

Cette beauté apparaissait toujours la nuit, le laissant seul, au réveil.

Il fallait bien qu’il la trouve, cette femme idéale, aux yeux bleus et à la peau nacrée.

Le hasard voulut que Graziella, la pie et le prince Théodore convergent vers un grand châtaignier qui promettait de beaux fruits à la belle saison mordorée où l’on récoltait le maïs et le raisin.

La pie se percha sur l’épaule de Graziella et lui offrit son amulette turquoise, ce qui accentua l’éclatante beauté de la jeune fille.

Le prince descendit de cheval, baisa la main de la jeune fille qui était  encore plus belle que la princesse de ses rêves et le trio baigna dans une lumière azurée aux reflets d’argent.

Consciente d’avoir favorisé une rencontre inédite, la pie s’éclipsa, cherchant une aventure qui lui permettrait de se renouveler et d’apporter à des couples le bénéfice de ses yeux bleus.

Graziella et Théodore devisèrent gaiement, trouvant un sujet de prédilection dans l’art de préparer des champignons et des baies sauvages.

Théodore envoya un message à son escorte qui le suivait toujours à bonne distance, s’apprêtant à intervenir si besoin était et il lui demanda de lui fournir prestement un carrosse attelé à des chevaux pommelés.

Son écuyer se chargea de ramener Polaire, sa fidèle jument, dans les écuries de son palais.

Les jeunes gens prirent place dans l’habitacle confortable du carrosse et ils mirent à profit le temps du voyage pour mettre leurs cœurs à l’unisson.

Ravie du dénouement, la pie chercha un lac d’émeraude pour offrir à un prochain couple le talisman du bonheur.

vendredi 26 novembre 2021

Sans égal

 

Profitant d’un vol d’oies sauvages fuyant les terres gelées pour se réfugier dans des réserves inondées de soleil, Johnny a plongé dans un océan de tendresse, celui qu’il a créé grâce à son amour de la musique et de l’harmonie.

Habité par un rythme qui rappelle les grands espaces amérindiens, sa faune sauvage, il arbore les fleurs de l’amour sur ses tenues de scène.

Avec un costume évoquant la figure légendaire de Davy Crockett, l’ami de son enfance, il mime la passion sous toutes ses formes, de Gabrielle aux grands airs d’artistes solitaires en mal d’amour.

Je ne sais pas s’il existe une rose Johnny mais à défaut, elle devrait être imaginée et baptisée.

Je l’imagine d’un rose velouté et nacré avec des pétales cerise ourlés de bleu.

Son parfum, subtil et boisé, légèrement fruité, laisserait flotter sur la terre un nuage cendré et tenace, aromatique et mystérieux.

Émergeant de cette bulle parfumée au son de la flûte enchanteresse d’un chaman, Johnny, tel le phénix, renaîtrait de ses cendres pour nous apporter la présence d’un amour légendaire et éternel.

L’amour est ce qu’il a cherché toute sa vie et il nous a transmis l’absolue nécessité de le poursuivre à notre tour, alliant à l’amour fou les ailes de l’espérance.

dimanche 21 novembre 2021

L'atelier de Francis

 

Des rideaux de velours bois de rose laissaient filtrer les rayons du soleil dans l’atelier de Francis, offrant ainsi des couleurs tendres qui nimbaient Céleste, modèle posant nu sur une bergère bleue.

Les yeux posés  tour à tour sur la toile et sur la jeune beauté dont il voulait saisir toutes les nuances de sa chair nacrée, Francis prenait à peine le temps de nettoyer ses pinceaux, craignant de voir s’échapper un reflet lumineux.

Céleste réclama une pause, revêtit une ample robe aux couleurs de l’arc-en-ciel et but à petites gorgées du thé au jasmin.

Francis avait sorti son carnet d’esquisses et poursuivait son travail de capteur d’âme singulière.

Céleste était pour lui une énigme vivante. Sa beauté relevait du divin et du mystère antique.

Un jour, lorsqu’il en aurait perçu toutes les nuances, elle ne l’intéresserait plus mais pour l’instant, il la voulait toute à lui.

Il posa ses crayons sur une table de merisier, enlaça Céleste, l’embrassa voluptueusement, la coucha sur son lit à baldaquin et s’empara des trésors cachés au tréfonds de son jardin d’amour.

Au réveil, il était seul.

Céleste s’était éclipsée discrètement, emportant la liasse de billets qui rémunéraient ses heures de pose.

Dans son petit appartement douillet et confortable, elle prit un petit déjeuner reconstituant, chassa Francis de sa mémoire et fit courir sa plume sur un parchemin rose pour emprunter une voie de traverse qui la conduirait à Compostelle.

Francis, de son côté, reprit ses pinceaux et trouva la nuance irréelle et sublime, un mélange de camélia, d’hibiscus et de crème onctueuse : il termina enfin son tableau.

Céleste resplendissait au cœur d’une forêt imaginaire inspirée par Brocéliande et son légendaire étoilé.

Nue, elle était nimbée d’une lumière irréelle et divine.

Son corps dont il croyait connaître les moindres frémissements offrait au monde une nouvelle naissance de Vénus, au cœur de la coquille nacrée, au sortir de l’onde.

Enivré par toute cette beauté, Francis ressentit à nouveau la morsure du désir et il courut à la recherche de son aimée, son incroyable Céleste qui incarnait à elle seule toutes les femmes du monde qui auraient pu le surprendre et l’aimer.

Sur la route qui le conduisait vers sa belle d’amour, il croisa une étoile filante, fit un vœu et se retrouva, pantelant auprès de son amour pour lui offrir son cœur enrobé de tendresse.

Il lui apportait en outre cette couleur profonde de l’émoi qu’il avait vu naître de ses pinceaux et qui porterait désormais son nom, le rose Céleste !

Bernard Roze

 

Bernard Roze

La plus belle perle de nos vies s’est brisée mais à présent chacun de nous reçoit du ciel l’étoile de l’espérance.

samedi 20 novembre 2021

Le sésame

Tu avais un sésame, Bernard, c’était la publication de tous mes livres dont tu étais le meilleur artisan, pianotant avec maestria sur le clavier en respectant les règles strictes imposées par la maison d’édition.

Ce sésame, tu l’as souvent brandi, espérant que le destin te protégerait. De mon côté, j’y croyais également.

Tu ne pouvais pas disparaître, comme cela, dans un souffle en me laissant seule, moi, ta protégée, ton aimée, ton épouse en un mot.

Et puis quelque chose a rayé la machine admirable de ton corps. Ta vue, les plus beaux yeux qu’elle eût jamais vus disait une ophtalmologue rennaise, a baissé considérablement : tu comprenais difficilement les sujets télévisés puis un triste après-midi, lors d’une séance de dialyse, tu as même oublié mon prénom.

Minimisant à dessein ce terrible événement, j’ai glissé dans tes effets ma carte de romancière, avec mon prénom écrit en relief, te recommandant de t’y reporter si cet oubli funeste se renouvelait.

C’était un signe du destin mais, à la maison, personne n’a voulu le comprendre car nous voulions à toutes forces te maintenir auprès de nous, espérant encore et toujours une amélioration de ton état.

Mais comme dans le magnifique roman de Jean Cocteau, Thomas l’Imposteur où le héros prononce le mot magique qui lui avait permis d’entrer dans un monde fabuleux qui n’était pas celui de ses origines, tu n’as pas pu utiliser ton sésame, mes écrits qui sans toi n’auraient jamais vu le jour et tu t’es envolé vers les vertes prairies du Jardin d’Eden où je te rejoindrai prochainement.

Au revoir, Bernard, j’ai le cœur bien lourd et j’ai à présent l’immense chagrin de savoir que tous ces écrits dont j’étais si fière n’étaient qu’une illusion puisqu’ils n’ont pas pu te préserver !

Gabrielle aux mains de fée

 



Dans une goutte de rosée, Gabrielle aux mains filées d’étoiles s’est incarnée et a surgi en un bouquet arc-en-ciel.

Sur sa légendaire moto bleue, Johnny a préparé l’immense hommage à l’amour, cœurs enchaînés dans une gestuelle rituelle qui nous lie et nous entraîne, pas après pas, dans une farandole d’amitié creusée dans les bleuets de l’âme et les fleurs géantes qui se mettent à marcher et à danser.

Médusées par un impromptu de Greg Zlap, les fleurs s’enchaînent dans nos cœurs, nous rendant immortels et heureux.

Le poète aux mains étoilées

Sur le quai d’une gare, il y a un homme qui m’attend.

Il est grand, un peu voûté et ses mains sont étoilées.

C’est un poète. Il porte un nom de personnage féerique, Aurore et il a l’accent occitan.

Moi, je suis venue de très loin, les ongles peints en bleu et j’ai un livre à la main, comme toujours, une tragédie de Sophocle et je souris.

Nous marchons dans  Saint Germain des Prés puis nous mangeons dans une brasserie.

Tu commences toujours par un potage me dis-tu, je mange distraitement car je ne sais pas pourquoi je suis venue.

« Mais pour l’amour », me réponds-tu en écho à mes pensées.

Je ne crois pas rechercher l’amour car il y a longtemps que je n’y crois plus et je suis repartie avec mes lourds secrets, mes rêves inachevés et mes poèmes toujours imparfaits.

Toi, tu as rejoint les étoiles, la Grande Ourse et tu es l’aurige qui emmène le grand chariot vers sa destinée.

De temps à autre, tu me gratifies d’une étoile filante que je capte comme un papillon.

Alors mes écrits scintillent et illuminent les parchemins vieillis que j’utilise toujours.

Sur les quais d’une gare, un poète m’attend mais lassé, il est parti vers les champs de l’azur dont on ne revient plus.

mardi 16 novembre 2021

Bouton d'Or

 



Bottines lacées sur des bas résille, la bouche en accroche-cœur, les yeux soulignés de bleu, sa couleur fétiche, Bouton d’Or surgit du pavé, son sac de perles à la main.

Coiffée d’un chapeau orné de roses, elle affiche ses couleurs, amour, fleur et rêve assuré pour les désespérés qui pensent qu’une liasse de billets peut acheter une âme rivée à un corps.

Leurs désirs refoulés font de toi, belle Bouton d’Or, une pauvre chose parfois brutalisée et lorsque tu réajustes tes parures, le devoir accompli, tu vacilles un peu avec l’espoir de ne pas être battue lorsque ton souteneur comptera les billets, le sourcil froncé et la main prête à frapper si le compte n’y est pas selon son bon plaisir.

Que la fée des fleurs vienne à ton secours, Bouton d’Or et qu’elle t’emmène dans les verts paradis où l’on peut enfin respirer un air pur et boire un verre de lait ou de jus de pomme.

C’est dans cette vallée perdue et riante que viennent tôt ou tard les belles exploitées, mortes de façon violente par le geste fou d’un client sadique, confondant l’amour avec la blessure qui s’ensuit, profanation totale d’un corps qu’il aurait voulu posséder de manière exclusive et vengeresse.

Belle Bouton d’Or, l’éternité te rendra ta dignité et ta beauté à nulle autre pareille et nous irons nous recueillir sur ta tombe où un ange sculpté veillera sur toi !

lundi 15 novembre 2021

Les fleurs bleues de l'amour



Dans le jardin d’Éden, des fleurs bleues ont surgi, couleur pervenche comme les yeux de Johnny.

Johnny les a cueillies et elles sont devenues des partitions. Des chansons nouvelles ont jailli de ses lèvres et un bandonéon a souligné l’aspect mélodramatique de ces immortelles ritournelles destinées à l’amour.

Bottines, foulards de soie, châles de cachemire, robes de satin et de madras ont habillé et chaussé une farandole de dames qui se sont précipitées au-devant de leur chevalier à l’âme ardente, au cœur palpitant comme les lèvres de Vénus.

Née d’un coquillage et de l’écume des vagues, la déesse s’est réjouie du choix de Saint-Barthélemy pour dernière demeure, près des dauphins et des tortues.

Nous irons dans les bois chercher des pervenches pour en faire des couronnes et ainsi coiffées, nous prendrons la mer pour saluer le chanteur de l’amour fou.

Accompagnées par nos amis ardents, nous fendrons les vagues au rythme de Quand on n’a que l’amour aussi cher à Johnny qu’à son magnifique créateur, Jacques Brel, ce défricheur de l’âme et de ses angoisses.

dimanche 14 novembre 2021

Pétales de cerisier

 



Venus tout droit des îles nippones, des pétales de cerisier ont envahi mon cœur, meublant mon imaginaire d’éventails, de kimonos et de sabres de samouraï.

L’un de ces combattants légendaires, à l’âme bien trempée dans l’acier, est venu au secours d’une geisha emprisonnée  dans un jardin impérial, près d’un étang où les carpes koï se transforment parfois en sirènes du levant.

La princesse Pivoine rencontra un jour le prince Chrysanthème, vêtu d’or et de pourpre.

Se promenant à petits pas, son livre préféré à la main, Le  Rêve dans le Pavillon Rouge, il cherchait celle qui ferait battre son cœur et envahirait son âme pour mettre l’azur en cage.

Il ne douta pas d’avoir trouvé la perle rare en apercevant la princesse Pivoine au détour d’une allée.

Tout de rose vêtue, auréolée de délicats pétales de cerisier, elle marchait telle une fleur vivante.

Mettant un genou à terre et déposant son livre fétiche aux pieds menus et fins de la princesse, il attendit qu’elle s’empare de ce présent subtil et réponde à sa flamme.

Ce geste accompli, les deux amants se prirent par la main et cheminèrent jusqu’au palais impérial où ils déclarèrent leurs fiançailles sous une pluie de pétales de cerisier qui comblèrent chacun d’un bonheur absolu.