lundi 24 juin 2019

Le fil d'argent


Le fil d’argent
C’est en brossant sa blonde chevelure que, dans un reflet de soleil sur sa psyché, Blanchefleur découvrit un fil d’argent.
Alors qu’elle s’apprêtait à enfermer le cheveu dans un petit coffret, une mésange pénétra par la fenêtre et se saisit du précieux trophée.
Nouvelle Yseult, Blanchefleur s’amusa de ce rapt, songeant que d’autres fils d’argent  décoreraient sa brosse de manière impromptue.
En fin d’après-midi, la mésange revint. Elle déposa un message sur la coiffeuse. Il était ainsi libellé :
« Cherche le bel aubépin, il te rendra jeunesse et beauté ».
Curieuse énigme, pensa Blanchefleur et cette nuit-là, elle s’unit fougueusement à son époux, Jehan le passionné, toujours épris de sa personne.
Mais il se produisit un événement qui sembla mettre un terme à leur interminable idylle.
Le ciel s’ouvrit en deux avec fracas et un orage terrifiant ravagea les terres riantes et productives du beau duché d’Armagnac, à l’image de leur amour.
Les vignes furent dépossédées de leurs grappes généreuses et des grêlons, semblables à des balles de croquet, jonchèrent le sol, criblant les habitations des villageois d’impacts aussi nuisibles que plaies béantes, atteignant aussi les grandes baies vitrées du château.
Jehan s’habilla promptement, mit ses bottes et disparut au petit matin pour ne plus jamais revenir.
On ne retrouva pas la moindre trace de son passage et chacun supposa qu’une bourrasque diabolique l’avait emporté dans un royaume mystérieux dont personne n’avait la clef.
Blanchefleur décida de prendre la route et de s’en remettre au message sibyllin de la mésange.
Le bel aubépin, cher à Ronsard, lui rendrait peut-être son bel amant.
C’est avec cet espoir qu’elle partit dans un char confortable avec une malle contenant des vêtements, quelques parures et son nécessaire de toilette.
La mésange se posa sur son épaule et ce fut le signal du départ.
Le cocher fouetta l’attelage qui partit, bon train, à l’aventure avec une promesse de fleur pour boussole.

vendredi 21 juin 2019

Dans le coeur d'une rose


Dans le cœur d’une rose
Dans le cœur d’une rose vibrait tout un royaume dont la reine était aussi une fée.
Son prince prenait parfois l’apparence d’un oiseau-lyre pour parcourir les terres gelées des souvenirs lointains.
Apparut un jour une jeune fille, en sabots, cheveux au vent.
Ses vêtements usés et troués en certains endroits contrastaient avec la beauté séraphique de la seule personne qui puisse rivaliser avec la reine.
Yseult, tel était son nom, se présenta à la cour en plaignante.
La guerre l’avait contrainte à fuir son village en feu et de nombreuses jeunes filles avaient subi des outrages de la part d’une soldatesque cruelle et barbare.
Elle n’avait dû son salut qu’à la rapidité de gazelle dont on la gratifiait au village.
L’état de ses vêtements plaidait en sa faveur car elle avait été contrainte à se cacher dans les fourrés pour échapper à ses poursuivants.
Afin de marquer sa compassion et son admiration pour son courage, la reine Rosemonde conduisit la jeune fille dans ses appartements.
Un bain parfumé l’y attendait, des vêtements de nuit en dentelle, satin et soieries, mules brodées d’or avaient été préparés avec soin et l’on apporta à la jeune conquérante un pichet de lait frais et des brioches moelleuses pour qu’elle puisse passer une bonne nuit.
Pour que la réception soit complète, la reine envoya un orchestre de poche, violoniste, violoncelliste et accordéoniste pour lui jouer un aubade.
L’orchestre se retira  dès que la jeune beauté eut donné des signes annonciateurs du sommeil.
Le lendemain , une semblable aubade  incita Yseult à se lever.
De jeunes demoiselles d’atour l’aidèrent à faire une toilette complète et à se vêtir et se parer.
Aussi belle qu’une princesse de conte de fée, elle se rendit à la salle à manger où on lui servit un excellent petit déjeuner.
La reine l’attendait dans le jardin.
Elle s’y dirigea et la trouva assise près d’une pièce d’eau où nageaient des cygnes.
Yseult prit place à ses côtés, sur un banc et toutes deux devisèrent jusqu’à ce que le soleil soit suffisamment haut dans le ciel pour qu’il devienne une gêne.
Elles rentrèrent alors au palais et la reine fit savoir  à la ronde qu’elle comptait organiser un grand bal pour honorer la présence de leur hôtesse.
L’effervescence fut de mise.
Robes, compositions musicales, préparation de buffets, rien ne fut laissé au hasard et l’on envoya des invitations aux quatre coins du royaume.
Enfin le grand jour arriva.
Vêtue de mousseline rose et de satin blanc, les cheveux tressés et ornés de minuscules roses blanches, Yseult fit sensation.
Des murmures approbateurs circulèrent à la ronde et les princes s’empressèrent de lui retenir une danse.
Le bal fut très animé et le buffet reçut une foule de gourmets, heureux de reprendre des forces et de conter fleurette à une belle esseulée.
Cette nuit-là, il se noua tant d’idylles que, par la suite, on fit référence au bal sous le nom de bal des fiancés.
Yseult était très courtisée mais chaque cavalier connut une sorte de déception car, tout en restant courtoise, elle ne laissa aucun espoir de romance possible, ce qui peut expliquer le succès d’autres jeunes filles, plus accessibles.
Après avoir dansé maintes gavottes, valses et mazurkas, Yseult éprouva le besoin de se promener dans le parc du palais.
Une licorne lui apparut et elle prit place dans un carrosse qui semblait avoir été préparé pour lui offrir la féerie d’une promenade inespérée.
Le cocher fouetta les chevaux qui partirent d’un bon train.

lundi 17 juin 2019

Toulouse ô Toulouse


Toulouse ô Toulouse
Dans Toulouse, la belle, qui fut créée sous la forme d’un cœur, ville chérie de Claude Nougaro, Yvan Cassar fut le trait d’union artistique de la célébration d’une commémoration nominative de l’esplanade du zénith, dédiée à Johnny pour ses 76 ans posthumes.
Les violettes du souvenir ont jailli des pavés pour crier l’indéfectible amour éprouvé par une cohorte de fans, venus en Harley pour escorter sa veuve et ses deux filles. D’autres amoureux du rocker qui régna sur leurs cœurs toute leur vie durant étaient présents, venus de tous les territoires comme au temps de ses concerts fabuleux.
Accompagné par une violoncelliste, Yvan interpréta au piano les mélodies de chansons immortelles et ce geste d’amitié adoucit la peine qui avait envahi les fidèles , parfois venus de loin pour redire encore et toujours qu’il ne fallait pas oublier l’absent merveilleux, habitant de leur âme.
Que vive Johnny, l’éternel guitariste à la voix de ténor !

dimanche 16 juin 2019

Le royaume du bonheur


Le royaume du bonheur
Dans les landes sauvages où s’alignent les vignes, il existe un tout petit royaume dont le prince a cinq ans.
Campé  dans son bateau de pirate destiné à faire échec au capitaine Crochet, il observe les alentours à la longue vue et s’attend à aller à l’abordage pour entasser des trésors qu’il rangera dans son coffre à double fond.
Il brandit son épée fleurdelisée, prêt à défendre son royaume.
Malheur à celui qui oserait dérober des bambous car ils abritent les oiseaux !
Le prince est là et il veille !
Dans ce royaume lilliputien, un géant de cinq ans s’apprête à connaître de grands bonheurs dont le moindre n’est pas celui de pouvoir jouer à en perdre haleine, le propre des enfants !

lundi 10 juin 2019

Toi qui cherches l'amour


Toi qui cherches l’amour
Toi qui cherches l’amour, l’amour fou des poètes, authentique et éternel, sache que tu ne le trouveras pas sur les berges d’un oued, dans une oasis, sous la forme d’une princesse des Mille et une nuits, vêtue de soie et de mousseline, parée de bijoux précieux.
C’est au détour d’un chemin de campagne qu’elle t’apparaîtra ou au cœur d’une ville pleine de marchands et de passants.
Elle aura l’ineffable beauté des femmes kabyles et son sourire énigmatique venu du fond des âges illuminera tes jours et tes nuits si tu es capable de gagner son cœur.
Les mains chargées de fleurs, elle entrera dans sa demeure, allumera le feu et préparera la soupe du soir et la semoule destinée aux enfants.
Mais pour que ce miracle d’amour apparaisse à tes yeux éblouis, il faut que tu pratiques une ascèse et chasses les démons qui ont envahi ton corps avide de plaisirs faciles et de pensées frivoles.
Après avoir délivré son message, la conteuse rangea son écritoire et s’en fut au fin fond de sa retraite, dans sa pergola décorée de roses et de groseilles, à l’écoute des oiseaux, porteurs d’espérance et d’amour.