L’oiseau bleu des oueds perdus
Un oiseau bleu, assurément celui des oueds perdus, est venu
frapper de ses jolies ailes turquoise, ma fenêtre givrée.
Je lui ai ouvert et il s’est métamorphosé en prince aux yeux
de lumière, aux mains veinées d’argent et à la taille bien prise dans une écharpe
tissée de fils d’or.
Il m’a offert une rose, celle des oueds perdus m’a-t-il
précisé et il s’est endormi sur la bergère du salon, fatigué par son long
voyage, hérissé de mille et un obstacles, filets tendus par les chasseurs,
avions supersoniques et collectionneurs de plumes azurées.
Lorsqu’il est revenu à lui, un bon feu flambait dans la
cheminée et j’ai pu lui servir mes préparations préférées, du thé à la
bergamote, des pastillas à la rose ainsi que des blinis recouverts de caviar d’
Aquitaine, succulent et revigorant.
Après cette dînette, mon prince m’a raconté les épisodes de
la vie qu’il menait dans son oued du bout du monde.
Tout y était resté comme jadis, au temps de ses pères.
Le matin, il partait à la recherche de fleurs étoilées et de
roses délicates dont ses dames d’atour parfumaient ses plats.
Un agneau enduit de beurre et de miel rôtissait à la broche,
du pain de ménage était enfourné en compagnie de galettes à la fleur d’oranger
puis, lorsque tout était prêt, après les ablutions traditionnelles, on
dégustait des mets savoureux.
Déçue de ne pouvoir offrir un tel festin à mon hôte, je me
suis mise au piano, interprétant des Nocturnes de Chopin puis nous nous sommes
endormis, cœur contre cœur, en rêvant d’ailleurs bleus.
Au réveil, j’étais seule, allongée sur le sofa et, à mes
côtés, il ne restait qu’une plume bleue, seul souvenir de mon rêve évanoui …
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