Dany,
alias Daniel Cordier, alias Alain, le philosophe, alias Caracalla, je te voue
une immense admiration.
À
19 ans, tu pars sans hésiter à Londres pour répondre à l’appel du Général de
Gaulle, toi qui vis dans un milieu bourgeois où il fait bon vivre et après
avoir rêvé un instant à un baroud d’honneur avec tes copains face aux Allemands
pour venger l’honneur de la France, tu suis un entraînement intensif Outre-Manche
et lorsqu’on te propose de revenir sur le sol natal, tu emportes avec toi une
ampoule de cyanure pour le cas où tu serais pris par la, gestapo !
Choisi
par Jean Moulin dont tu ne connais que le nom de code, Rex, tu es son secrétaire
et l’administrateur de toutes les besognes conçues par ce chef dont tu admires
la vive intelligence et le sens patriotique porté à l’extrême.
Après
avoir lu mille page qui décrivent par le menu les tâches ingrates et difficiles
que tu exécutes sans broncher, allant de çi, de là, d’un extrême de grande
ville à un autre, risquant à tout instant une arrestation, je garde de toi un
portrait en creux, celui de Jean Moulin dont tu crains l’issue fatale tant les
divisions des réseaux étaient fortes.
Restant
des heures aux aguets, guettant la lueur de la lampe dans la chambre
obstinément vouée au noir, tu ne te soucies pas de ton confort et lorsque la
silhouette de Rex se découpe sous le porche d’une rue peut-être transformée en
souricière, tu respires, heureux de le voir encore soustrait à l’arrestation
qui ne manquera pas d’arriver.
Quant
à toi, Dany, sauf par dénonciation d’un Judas de groupe, tu ne risques rien. Tu
t’es toujours demandé pourquoi Rex t’avait choisi et la réponse apparaît en
filigrane avec une éblouissante clarté, mais parce que tu étais un charmant
jeune homme, je dirais presque un enfant et que personne ne peut soupçonner que
tu manies un révolver comme personne et que tous les sports de combat te sont
familiers.
Avec
l’écharpe bleue offerte un jour par Rex et que tu as gardée encore aujourd’hui,
la portant parfois, tu erres dans notre imaginaire et nous savons, Dany, que si
une dizaine de jeunes gens à ton image avaient entouré et veillé le grand Rex,
jamais il n’aurait été pris car tu étais son double et qu’à vous deux vous
aviez la même âme d’enfant.
Merci Dany d’avoir
existé, de nous avoir laissé ces précieux souvenirs et de vivre encore avec l’étincelle
de la jeunesse dans ton regard vif de nonagénaire !
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