Haut perché dans les nuages, un château
de granit rose défiait les oiseaux.
Après avoir couru après les papillons,
Séréna s’assit au pied d’un églantier et s’assoupit un moment. Lorsqu’elle s’éveilla,
elle distingua une échelle posée au pied d’un chêne. Sans plus réfléchir, elle
grimpa sans relâche et se trouva sur le perron d’un château.
Des hérauts annoncèrent son arrivée avec
apparat et une gouvernante richement vêtue d’un fourreau de satin l’introduisit
dans une salle réservée aux visiteurs.
Une jolie femme souriante et enrubannée
de soie et de bijoux trônait sur un fauteuil damassé pourpre et or. Elle se
présenta sous le titre de fée des nuages et accorda sa main à la visiteuse, l’invitant
à prendre place à, ses côtés sur un fauteuil similaire décoré de
représentations de fables de la Fontaine. Le loup et l’agneau, Perrette et le
pot au lait jetaient une note claire et malicieuse.
La fée donna quelques ordres à une
brigade de serviteurs qui se pressèrent vers les cuisines. Ils en revinrent
chargés de plateaux où l’on distinguait de la pastilla, des tortillas et des
tartelettes paysannes aux légumes. Des bonbons de galettes fines étaient garnis
d’un mélange de fromage de chèvre frais et d’herbes ciselées. Dorés au jaune d’œuf,
ils avaient été passés au four et donnaient un fondant chaud des plus
agréables.
Des carafes de sirop d’orgeat, de rose
et de limonade aux fruits circulaient parmi les convives car une petite cour s’était
formée pour honorer la visiteuse.
Sans bouder le plaisir de se voir offrir
un tel accueil, Séréna se demandait ce que l’on attendait d’elle.
La réponse lui vint avec l’entrée d’une
nuée de petites fées, à sa taille.
« Le royaume des fées vous
attendait pour que ces jeunes magiciennes connaissent les habitants de la terre
et leurs coutumes. Nous vous avons choisie pour votre intelligence, votre
facilité d’adaptation et votre regard bienveillant sur autrui ».
Séréna fut invitée à suivre l’escorte
des fées dans leurs appartements. Une femme de chambre lui proposa de se
reposer dans ses appartements personnels. C’était un très bel ensemble
constitué d’un boudoir, d’une chambre dont les fenêtres donnaient sur le ciel,
d’une ravissante salle de bains où abondaient produits de beauté, parfums et
différents onguents pour le corps et le visage.
Une pièce claire et drapée d’étoffes
lumineuses mettait en valeur un secrétaire, un piano et un dressoir où robes
variées, élégantes et confortables, de belles chaussures qui allaient des
ballerines aux sabots de jardin laissaient penser que rien n’avait été confié
au hasard.
À dater de ce
jour, Séréna eut à cœur de remplir sa mission. Les journées étaient très
agréables. Les fées apprirent à jouer à la marelle, on leur offrit des poupées
et des jeux d’adresse, fléchettes, mikado et playmobils.
Elles apprirent à chanter. Séréna leur
raconta les histoires qu’elle connaissait. La Belle au bois dormant leur
plaisait beaucoup. Elles voulaient toutes savoir si les princes étaient encore
de ce monde. Séréna ne voulut pas mentir et reconnut que les princes, s’ils
existaient, n’avaient rien de comparable avec ceux qui évoluaient dans les
contes. Ainsi des princes en Arabie avaient souvent plus de soixante-dix ans, ils
n’aimaient que la chasse au faucon, le pétrole et l’or.
Quant aux princesses, elles manquaient
de liberté.
Les fées s’indignèrent et promirent d’émanciper
ces malheureuses.
Les mois passèrent au rythme des jeux et
de l’instruction mêlés, ce qui était un mode d’enseignement agréable et au moment
même où Séréna était en train de se dire que bientôt elle n’aurait plus de
révélation à faire à ses compagnes de jeux, un grand vent souffla dans la pièce
où elle se tenait et l’emporta en un tourbillon tapissé de barbe à papa.
Elle se
retrouva au pied de l’églantier où elle s’était endormie et n’était pas loin de
penser qu’elle avait rêvé. Cependant un vol de papillons qui ressemblaient à s’y
méprendre à ses compagnes féeriques lui apprirent qu’il n’en était rien et qu’elle
était revenue sur la courbe du temps au point zénith de son aventure !
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