Il porte un œillet rouge
à la boutonnière, des souliers vernis et dans la brume de la rivière, sa
casquette coiffe crânement sa chevelure de poète.
Il avance vers son
destin, droit devant et moi qui suis sur l’autre rive, je ne parviens pas à
attirer son regard.
Qu’importe ! Il
va, le bel André et rien ne peut le détourner de son destin.
Bientôt les portes de
la grande usine s’ouvriront et il entrera avec tous ses compagnons dans l’atelier
sombre où rougeoient les forges.
Le métal se tordra
sous leurs coups redoublés et éclateront en roses de feu qui orneront les
balcons des belles rêveuses de l’autre rive.
Le martèlement du fer
vaut bien celui des sabots des chevaux qui frappent la lande pour faire jaillir
les étincelles de la victoire.
Lorsque sonne l’heure
du départ, André et ses pareils sortent, le pas lourd et rêvent au dimanche où
ils pourront faire danser les jeunes filles.
Je suis passée de l’autre
côté de la rive avec la complicité d’un marinier et j’accueille André avec un
panier de victuailles.
Il le prend poliment « pour
sa mère » me dit-il et part d’un pas rapide, me laissant au milieu du
chemin, rêveuse et dépitée.
On ne passe pas
aisément de la rive droite à la rive gauche car c’est là que réside l’esprit
des Compagnons du Devoir !
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