Il était une fois une
femme qui ne supportait plus de voir l’ombre de l’âge obscurcir ses traits.
Elle acheta des voiles
somptueusement brodés pour cacher les offenses du temps et partit ainsi vêtue
faire ses emplettes.
Elle croisa en chemin une femme entièrement
vêtue de noir. Elle marchait presque en aveugle car une sorte de meurtrière
avait ménagé une protection pour ses yeux qu’elle avait soigneusement
maquillés.
« Que vous
arrive-t-il, chère amie ? La lèpre aurait-elle envahi votre corps pour que
vous soyez ainsi masquée ? À voir vos jolis yeux, je n’en crois
rien et je vous félicite car pour ma part j’ai toujours eu horreur des pinceaux
et artifices du maquillage et je m’y résoudrai jamais.
Chère sœur, si je suis
ainsi vêtue, c’est uniquement par pudeur. Je crains d’offenser le regard de Dieu
et celui des hommes !
Ciel ! Où vous
situez-vous donc sur l’échelle divine et humaine pour vous punir ainsi du
regard impur des hommes ? Car je vous le dis, ce sont les hommes qui sont impurs
avec ces idées malsaines qui jaillissent à la simple vue d’une jolie femme.
Jadis je ne pouvais
pas faire un pas sans que des sifflets et des propositions grossières viennent
à mes oreilles mais j’ai vu ces hommes pour ce qu’ils sont, de grands enfants
et j’ai poursuivi dignement mon chemin, heureuse que le vent m’enveloppe d’un
voile passager.
Croyez m’en, ne vous
affublez pas de cette étoffe qui vous fait ressembler à un pauvre oiseau fou.
Dieu et les hommes dignes d’être aimés sauront vous distinguer ».
Mais la femme vêtue de
noir soupira, baissa la tête, ce que son aînée ne pouvait pas supporter et
poursuivit son chemin en murmurant : « Vous ne connaissez pas
tout, sœur aînée, venez dans nos cités et vous comprendrez ».
Sur ces paroles
énigmatiques, elle disparut, petite silhouette fragile à la merci des hommes.
Ce monde est
décidément détestable pensa la femme voilée et résolument elle se débarrassa de
la belle étoffe qui protégeait son visage et offrit ses rides au vent !
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