Céleste aux doigts de fée
Assise près de la fenêtre afin de capter chaque rayon
lumineux, Céleste, considérée dans son village comme une fée tant ses doigts
créent des motifs en dentelle de manière divine, Céleste disais-je, rêve en
créant d’immatérielles rosaces.
Des papillons stylisés naissent de ses doigts et ce monde
irréel et féerique recrée l’harmonie qui devrait régner sur cette terre si
malmenée par les humains.
Son dé d’or, obtenu lors d’un concours, lui permet d’atteindre
des sommets car il lui procure une étrange sensation d’invincibilité.
Brodant et créant sans relâche, Céleste, si bien nommée, ne
voit pas le temps passer et lorsque les premières lueurs sombres lui rendent la
tâche plus difficile, elle décide de poser son ouvrage et de remettre au
lendemain la poursuite de ce travail si délicat qu’il semble celui que l’on
offre aux fées.
Elle s’étire, ouvre ses fenêtres et observe le ciel, à la
recherche de l’indice qui lui permettra de savoir si la journée sera bonne
demain.
Sur le rebord de la fenêtre, elle trouve un panier contenant
des victuailles avec ce petit mot : « n’abîme pas tes jolis
yeux ô mon aimée » et ce billet doux est signé Cédric, le jeune homme du
village, riche et beau et chacun sait qu’il est épris de la belle dentellière
du village.
Céleste sourit et se nourrit de ces mets préparés avec amour :
pain fleurant bon les céréales, poudré de sésame, crème onctueuse, miel,
citrons aux arômes subtils , oranges douces, vin de fleurs et pâtisseries
délicates dont les recettes se perdent dans la nuit des temps.
Alors qu’elle se prépare à se mettre au lit, après une
toilette soignée, notamment des soins manucurés, des sons agréables
retentissent près de sa demeure et Cédric en personne entonne une romance d’amour.
La jeune brodeuse s’endort au son des mandolines et des
violons et lorsqu’elle s’éveille, elle trouve, en ouvrant ses volets, une
demande en mariage en bonne et due forme et elle sourit de ce beau présage,
pensant que ses créations en seront magnifiées.
Elle rêve de sa future robe de mariée, de sa coiffe et de
son aumônière brodée et elle imagine également une chemise à jabots pour son
époux.
La journée se passe avec célérité et, à la nuit tombée, elle
oublie broderies diverses et créations pour tomber dans les bras de Cédric qui
l’embrasse avec volupté et amour ardent.
L’ange de la nuit les enveloppe et ils murmurent des mots
doux qui les emmènent vers les pays où l’on ne brode jamais tant la création
est protéiforme et visible à l’œil nu.
La dentelle de l’amour les protège des frimas et des aléas
du destin.
Dentelle, ô dentelle, règne sur le monde pour le régénérer
et lui redonner les paradis perdus !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire