La reine des cygnes
Dans une île lointaine habitée par des cygnes, vivait une
reine toujours vêtue de blanc. Elle régnait sur ses sujets avec douceur et
délicatesse et pour cause : ce sont les cygnes qui l’avaient recueillie,
bébé, reposant dans une nacelle d’osier, bien calée sur des coussins moelleux
et vêtue d’une robe de dentelle.
Alertée par les appels des cygnes, la fée des grèves avait
agi avec célérité après avoir lu un billet épinglé sur ses vêtements : «
Prenez soin de ma petite Virginia car elle n’est pas en sécurité auprès de moi »
Ce petit mot était signé Regina sans que l’on sache s’il s’agissait de son
titre de reine ou si c’était plus simplement son prénom.
Peu importe se dit la fée, ce qui importe c’est l’éducation
de cette adorable enfant.
Elle fit jaillir un palais près de la crique où on avait
recueilli son berceau flottant et elle se fit aider par une multitude de
petites fées et de lutins travailleurs et astucieux pour que cette habitation
soit digne de sa royale filleule : l’enfant portait une petite couronne d’or
dans son moise offert à l’océan, ce qui semblait corroborer la piste royale du
prénom maternel.
Virginia vécut parmi les petites fées et les lutins et
chaque soir, la fée des grèves prenait son repas avec elle, s’informant de ses
progrès en lecture et écriture.
Devenue adolescente, elle obtint la permission d’organiser
des fêtes à l’occasion de la naissance des bébés-cygnes et c’était un plaisir
de la voir aussi maternelle avec ces bébés si charmants.
Un jour, lors d’une promenade sur la grève, elle trouva une
amphore cachetée de cire. Prudemment, elle la remit le soir même à la fée et c’est
ainsi que sa marraine en apprit plus sur le passé de sa filleule.
C’était un appel de Regina qui confirmait sa naissance
royale : elle disait en substance que le danger était enfin écarté et que
sa fille pouvait revenir en son royaume et s’y marier si elle en éprouvait le
besoin.
La fée montra à Virginia le berceau dans lequel elle avait
affronté les flots et les vêtements luxueux qu’elle portait ainsi que sa petite
couronne, sans oublier le petit mot qui expliquait ce geste téméraire et fou.
La reine des cygnes dit enfin à sa véritable mère, celle qui
l’avait sauvée des vagues et élevée avec tous les critères d’une parfaite
éducation, qu’elle hésitait à se rendre dans un royaume inconnu pour y
rencontrer une mère qui n’avait pas su la protéger.
La fée n’insista pas et aborda les sujets traditionnels et
éducatifs : elle pensa que le temps ferait son œuvre et que la curiosité
pousserait sa filleule bien aimée à en savoir plus.
De son côté, elle se livra à une enquête, renouant avec
celle qu’elle avait conduite lors de la découverte du bébé mais, cette fois
encore, ses pouvoirs de fée se montrèrent impuissants.
La vie reprit son cours dans l’île aux cygnes et leur reine
décida de ne jamais quitter cet endroit paradisiaque qui l’avait sauvée de la
mort possible et de la haine d’un inconnu.
Elle souhaita organiser un bal et fut aidée dans ses préparatifs
par la fée qui ne ménagea pas ses efforts.
On envoya des invitations dans tous les royaumes voisins et
lorsque le jour de la réception arriva, il vint des attelages et des barques
princières de partout.
Des violonistes jouèrent des mazurkas et des quadrilles sans
oublier des valses royales et la reine fut incontestablement la femme la plus
courtisée car sa beauté était éclatante et lui conférait un supplément
indéniable sur toute beauté singulière.
Elle passa une soirée charmante et prit plaisir à fréquenter
des personnes qui ne connaissaient pas son univers marin.
Un jeune homme, vêtu avec élégance mais sans ostentation
retint son attention : il se prénommait Vivien et il avait une jolie voix
mélodieuse qui semblait faite pour la poésie et le chant.
Virginia se prit à songer à lui avec une sorte de langueur
les jours suivants et elle fut aux anges lorsqu’une invitation à se rendre dans
le royaume du jeune homme lui parvint sous la forme d’un message porté par une
mouette.
La fée conçut une robe féerique pour sa filleule ainsi que
des tenues annexes pour des promenades en bord de mer. Elle attacha le plus grand soin à
la confection de chapeaux assortis aux toilettes vaporeuses de la jeune fille
puis la confia à un petit groupe de lutins et de fées chargés de veiller sur
elle nuit et jour.
La reine Virginia connut des moments délicieux en compagnie
de Vivien et ils décidèrent de proclamer leurs fiançailles. La fée des grèves
apparut pour donner son accord et l’on entendit le cri des cygnes qui
accordaient à leur reine leur gage d’amour pour un bonheur parfait !
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