Un lion, taxé d’excessive cruauté par
ses pareils et banni de son clan, s’était réfugié dans un ermitage après avoir
rugi tout son soûl dans les forêts profondes.
Devenu végétarien par la force des choses,
il avait dévoré des livres laissés par un moine penseur. Pleurant sur ses
chasses effrénées, il alla jusqu’à couper ses griffes en signe de repentance.
Jugeant sa métamorphose complète, il
décida de rentrer dans le rang et de concourir au sacre du roi léonin.
Il serait passé inaperçu si une
vieille lionne qui lui avait servi de nourrice et qu’il avait défigurée d’un
coup de patte magistral pour marquer son indépendance ne l’avait reconnu. Elle
ameuta le clan de ses cris déchirants. « Comment oses-tu te présenter à
nous, ô le plus détestable des lions ? » lui dit le roi lion qui
remettait en jeu sa couronne de chêne, son pareil dans le monde végétal.
« Je me suis amendé, ô grand roi
et je puis t’en donner l’irréfutable preuve que voilà » et ce disant il
découvrit ses griffes fortement endommagées.
« Qu’avons-nous à faire d’un
lion dépossédé de ses pouvoirs ? » dit le roi, plein de hargne.
« Retourne d’où tu viens et ne
te présente jamais plus dans notre auguste assemblée ».
« Quelle ingratitude, roi de Carnaval !
Tu seras châtié de belle manière ! »
Sur ces mots, le lion repenti bondit
sur le roi et lui sectionna, d’un coup de dent, son artère vitale. Puis, se
tournant vers l’assemblée apeurée, la patte droite sur la dépouille du roi
anéanti, proféra ces paroles définitives : « Un lion reste lion à
jamais. Tenez le vous pour dit et tâchez de m’obéir en toutes circonstances, à
moins d’être puni. »
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