jeudi 14 juin 2018

Le temps des héros


Le temps des héros
Alors que de nombreux minotaures hantaient des labyrinthes monstrueux, tapis dans l’ombre et prêts à frapper des jeunes gens venus à leur rencontre, il se trouva que des héros surgissent là où on les attendait le moins.
Arnaud Beltrame, officier supérieur de gendarmerie qui avait couvert d’innombrables sites dangereux avec courage et succès, offrit sa vie en échange de celle d’une malheureuse otage, déterminé à dominer le forcené par son art oratoire et son expérimentation du combat.
Il ne mourut pas instantanément mais subit de telles blessures qu’il trouva le trépas, laissant une future mariée éplorée.
Un jeune homme venu du Mali après un incroyable périple digne de l’Odyssée, bondit pour escalader un immeuble parisien afin de sauver un jeune enfant qui se tenait d’une main à un balcon !
Qualifié par la suite d’homme-araignée, le jeune Moumadou  fut reçu à l’ Elysée : récompensé par des diplômes et des décorations valant chacune leur pesant d’or, il obtint finalement ce pour quoi il était venu dans notre pays, des papiers officiels et un emploi aux Pompiers de Paris, corps prestigieux s’il en est !
On le disait laveur de carreaux, « au noir » vraisemblablement et il vivait dans un foyer d’accueil.
Son acte de bravoure lui valut un dénouement heureux.
Puis il s’en trouva d’autres qui sortirent de l’ombre, semblant dire « et moi ? » car il apparaissait que des héros vivaient parmi nous sans que l’on s’en rende compte !
Les partis politiques qui faisaient leurs choux gras des velléités fascisantes d’un groupe assez conséquent de l’électorat, firent la grimace et jouèrent les fines mouches en félicitant les héros du bout des lèvres, glissant perfidement des bémols perfides bien sentis.
Néanmoins les héros absolus furent de jeunes morts.
Une image nous hante, c’est celle d’un jeune enfant qui semble dormir sur un rivage. Semblable dans son immobilité à La Jeune Tarentine d’ André Chénier, il dort d’un étrange sommeil !
Aylan est mort et son image fut diffusée comme l’appel au secours de toutes les personnes qui franchissaient  la mer pour échapper à la tyrannie, au servage ou à la famine régnant chez eux.
La mer Méditerranée, si belle et si accueillante est devenue un gigantesque mouroir où échouent ceux qui n’ont pas eu la chance de passer de l’autre côté de la rive, à pied sec !
Ayons également une pensée émue pour de jeunes africains qui se cachèrent dans le fuselage d’un avion et que l’on retrouva morts de froid.
Jouant leur va-tout et pensant sans doute qu’ils ne sortiraient pas indemnes de l’aventure, ils avaient écrit une lettre que l’on retrouva sur leur cadavre, une lettre admirable, écrite dans un français classique et littéraire dans laquelle ils exposaient de manière cartésienne, les motifs de leur démarche désespérée : un drame absolu car ces jeunes gens avaient le profil de futurs énarques ou philosophes ou encore de mathématiciens dignes de figurer dans le panthéon de nos grands hommes.
Mais quand bien même ces personnes décédées eussent été de futurs jardiniers ou des ouvriers, ils n’en auraient pas moins été dignes d’être aimés par notre mère patrie !
Le duo Maître Gims-Vianney fit entendre sur les ondes des chansons rythmées, alliant la beauté africaine à la poésie française, retrouvant la force qui animait le Zoulou blanc et son danseur, assassiné par d’abominables racistes.
Portant haut la parole de la France, alliant des phrases choc en Anglais et des formules dignes du théâtre, notamment un « La belle affaire ! » en réponse à des critiques sur sa politique étrangère, notre Président fit feu de tout bois pour rendre à un pays endormi, vivant comme au temps de Louis XV où l’on se gaussait des défaites l’armée, un semblant d’âme, tâche ardue s’il en est !
Ce n’est pas un hasard si Gérard Depardieu a incarné au cinéma un Cyrano de Bergerac qui tremblerait d’effroi si on le situait dans le Paris de notre temps, oscillant entre misère et pauvreté et bourgeoisie bohème.
Ce n’est pas cent hommes qu’il devrait affronter Porte de Nesle mais des milliers de truands qui préfèrent la kalachnikov à la rapière de d’Artagnan !
Triste temps des héros où l’on ne sait plus s’il faut rire ou pleurer !




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