L’orient de tous les rêves
Mais il en va de l’amour comme dans les rêves, l’eau vive
des ruisseaux et les serments enfantins, il s’échappe et s’enfuit sur les
pierres brulantes du lit où il serpente, décrivant mille et une arabesques.
Après avoir juré à sa bien-aimée qu’il ne la quitterait
jamais, le prince lui fit ses adieux, arguant du fait qu’il avait besoin de
mettre de l’ordre dans son palais et dans son royaume pour pouvoir l’accueillir
en reine, comme elle le méritait.
Sa beauté de femme mûre l’émouvait et il sentait poindre en
lui les affres de la jalousie, à la pensée qu’un autre amant puisse se saisir
de l’objet aimé et le traiter comme il l’avait fait, sans retenue, poussé par
une folle passion.
Blanchefleur dut lui jurer mille et une fois qu’elle n’aimerait
que lui et qu’elle attendrait sagement qu’il la fasse chercher.
A chaque serment, le prince enlaçait sa belle, la couvrait
de baisers et trouvait à chaque fois une manière subtile et innovante pour s’emparer
de son corps qui devint un brasier.
Finalement, Blanchefleur, à force d’être honorée avec tant
de ferveur, de vigueur et de passion dévorante, ne fut pas fâchée de voir
partir ce prince dont les lèvres semblaient avoir été faites pour donner et
recevoir des baisers.
Sœur Myriam et les moniales la rejoignirent en son palais d’amour,
devenu bien vide et le décorèrent des pièces du trousseau qu’elles avaient
cousu et brodé.
Mise dans la confidence par le prince, sœur Myriam avait
voulu apporter sa touche de beauté, pensant qu’au château ancestral, il n’y
avait plus de véritable place pour Blanchefleur : deux dames douairières
pour un fils, l’une était de trop et il était bon pour la veuve d’ Eudes le
Valeureux de convoler en des noces qui lui apporteraient le confort et la
douceur de vivre.
Les deux amies échangèrent des propos intimes, dévoilant les
méandres de leur cœur.
Sœur Myriam assura Blanchefleur de son total soutien et elle
déclara qu’elle partirait en sa compagnie dans cette terre d’orient, si étrange
et si enchanteresse.
Sur les entrefaites, un message émanant du prince arriva
grâce à l’entremise d’une colombe.
Le parchemin était scellé par un cachet de cire aux armes du
prince et il contenait une émeraude qui accentuait la douce féerie de ses paroles :
« Ma douce toute en soie, tu m’es si proche et si
lointaine à la fois ! Lorsque je m’éveille, je sens ton corps doux et
ferme au creux de mes reins mais je n’étreins que la brise, prodiguée par l’éventail
de ma nourrice.
Elle entend mes pleurs dans la nuit et accourt pour me
bercer comme un enfant.
Je suis à toi pour toujours, mon ange, et je rêve de pouvoir
t’étreindre à nouveau avec toute la fougue renouvelée par cette absence dont je
souffre en rêvant.
Ton amant pour l’éternité. »
Blanchefleur rangea ce message ardent dans un coffret de
nacre et elle entreprit d’y répondre.
La colombe attendait sagement qu’on lui confie un parchemin.
« Mon doux enchanteur, je me livre en retour à tes
étreintes passionnées. Tu m’es devenu si cher que je ne pourrais vivre sans
toi. Je porterai ton émeraude comme un gage d’amour et attend, avec la foi de l’amante,
que nos lèvres s’unissent à nouveau et que nos corps s’embrasent sous le ciel
de lit des épousés.
Ton amante, fidèle et soumise ».
Elle lesta le parchemin d’un saphir qui rappelait l’azur de
ses yeux, y apposa son sceau personnel, lys et roses et confia le message à la
colombe qui prit instantanément le chemin du retour.
Avant de partir, le prince avait pris la précaution de
choisir des personnes fiables pour habiter un village qu’il avait fait
construire autour du palais.
Blanchefleur et ses amies bénéficièrent ainsi des fruits de
la terre et des vergers ainsi que du produit d’une chasse raisonnée pour vivre
confortablement.
Conserves, confitures, salaisons complétèrent les ressources
naturelles, faisant de cet endroit ravissant un nouveau paradis.
Enfin le jour du baptême de la petite Salomé fut annoncé et
toutes ces dames furent conviées pour participer à l’événement sacré et festif.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire