Le lac aux émeraudes
Dans un mythique lac profond nommé Lac de Lancelot, encastré
dans de hautes landes, se trouvaient des émeraudes si belles que des audacieux
plongeurs tentèrent l’aventure.
La récolte fut mince au regard du danger encouru.
Cependant une jeune fille, corsetée d’audace et d’amour de l’aventure,
prénommée Marjorie, décida d’opérer par petites touches et elle rapporta
bientôt un bel assortiment de pierres précieuses dont la pureté et l’éclat
étaient admirables.
Estimant qu’elle en avait suffisamment pour les faire
tailler, elle se rendit à Anvers et choisit le meilleur des joaillers pour que
la mise en valeur des émeraudes soit parfaite.
Elle se promena dans la belle ville dont les peintres
flamands avaient célébré la beauté commerçante et luxueuse.
Dans l’atmosphère baudelairienne de L’Invitation au Voyage,
elle longea les quais et s’intéressa aux vitrines des bijoutiers qui mettaient
en valeur la perle sous toutes ses formes.
Pour le plaisir, Marjorie se fit présenter des parures après
avoir revêtu une tenue d’apparat pour qu’on la reçoive en cliente potentielle.
Le tailleur d’émeraudes lui avait offert une jolie somme
pour cautionner le prêt des joyaux c’est pourquoi Marjorie put s’offrir un collier de perles blanches qui était du plus
bel effet sur sa tenue azurée.
Ainsi parée, Marjorie poussa la porte d’une librairie,
feuilleta des livres et découvrit un ouvrage féerique au titre évocateur :
La mystérieuse cité des perles lacustres.
Elle acheta le livre après avoir lu les premières lignes qui
étaient de bonne facture et rentrée dans sa chambre d’hôtel, elle se plongea
dans la lecture.
L’auteur qu’elle ne connaissait pas citait le lac aux
émeraudes, prétendant que les perles l’emportaient en beauté et en pureté sur
les émeraudes tant convoitées.
Troublée par ce détail, Marjorie se promit de reprendre ses
investigations lacustres lorsqu’elle reviendrait sur les lieux mythiques,
nantie des parures réalisées avec sa première récolte de joyaux.
De retour sur les bords du lac, elle recruta du personnel
capable de vendre les parures dans une petite bijouterie dont elle fit l’acquisition
puis elle prépara soigneusement ses premières plongées.
Elle opta pour le biais mythologique pour sa première
descente dans le fond du lac.
A bord d’un énorme coquillage qui avait l’organisation d’un
bathyscaphe, elle explora de visu avec une lampe à ultraviolets les huitres
susceptibles de contenir des perles.
Il y en avait un banc dont la taille semblait
exceptionnelle.
Convaincue que c’était le réceptacle d’une fabuleuse
moisson, Marjorie revêtit un scaphandre
rose et plongea pour ne plus jamais remonter à la surface car l’auteur du livre
qui avait bouleversé sa vie était un enchanteur qui attendait l’aventurière
capable de tenter l’impossible pour se procurer les perles d’amour.
« Ce collier est pour vous, ma divine » dit-il à
Marjorie, en faisant cascader un merveilleux sautoir de perles irisées et il l’embrassa
longuement. Il se permettait cette licence car il était sûr qu’elle serait sa
compagne pour l’éternité.
C’est ainsi que le lac aux émeraudes fut rebaptisé Lac des
perles d’amour mais personne ne commit la folie de plonger pour s’emparer de ce
trésor divin.
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