Le duc du Hainaut était un homme actif : pêche, chasse,
rimes en chambre et écriture romanesque étaient son quotidien.
Un jour, dans un bois domanial, il aperçut une fée dansant
avec une telle grâce qu’il en tomba amoureux. Il voulut lui présenter ses
hommages mais la fée s’évapora, laissant derrière elle un parfum de rose et de
jasmin.
Imprégné par ces fragrances féeriques, Mérovée du Hainaut
rentra dans son château, relut La Grande Encyclopédie des fées de Pierre Dubois,
espérant trouver la trace de sa dame d’amour. Ne voyant rien qui s’apparente à
sa vision, il se laissa aller à la rêverie, ne se nourrissant que des produits
de la forêt, poêlée de cèpes et autres champignons, bécasses rôties, rayons de
miel sauvage et tartes aux fruits rouges.
L’annonce du concours de poésie lui rendit son allant.
Il écrivit son texte avec ferveur, commanda un gâteau cuit à
la broche à son chef cuisinier et expédia le tout à l’adresse donnée par la fée
Rubis.
Apprenant qu’il faisait partie des « nominés », il
se prépara méticuleusement pour paraître à son avantage : tenues d’apparat
mettant en valeur sa silhouette virile, manteau de zibeline et toque assortie,
bottes en cuir de Russie furent entreposés dans une malle contenant des
chemises de soie, des pulls de laine mohair et du linge de corps ainsi que des
produits d’hygiène et de parfumerie.
Il apportait un cadeau, robe vaporeuse couleur safran et
parures précieuses à base d’or, d’ivoire, diamants et pierreries lumineuses.
Son carrosse s’ébranla et lorsqu’il arriva dans le domaine de
la fée Rubis, il ne passa pas inaperçu.
Plus d’une belle sentit son cœur battre dans sa poitrine à sa
vue mais il ne répondit à des avances muettes que par un sourire convenu.
Il rêvait de voir apparaître l’objet de ses pensées et de ses
désirs, la fée Rubis pour qui il éprouvait une dévorante passion.