Cléa et Aurélien décidèrent d’un commun accord de ne plus
demander à Maroussia la prestation de sa fabuleuse danse des poignards.
Il est temps qu’elle vive comme toutes les petites filles de
son âge dit Cléa et elle l’inscrivit à l’école communale où l’on découvrit que
son niveau scolaire était satisfaisant.
La vie en roulotte ne l’avait pas coupée du monde et elle
avait suivi des cours par correspondance, Soraya sa mère adoptive se sentant
responsable de son devenir.
Ils avaient découvert l’enfant dans un berceau d’osier lors d’une
halte. Sur sa brassière de laine un petit mot était épinglé : Maroussia.
On suivit cette recommandation à la lettre et Soraya, jeune
veuve de vingt ans, fidèle au souvenir de son mari mort dans une rixe de
village, avait revendiqué la joie d’être mère grâce à ce don du ciel.
Pour que Maroussia ne perde pas ses qualités artistiques,
elle suivit également des cours de danse classique, de gymnastique et de violon
où elle livra son âme vagabonde.
Les années passèrent et un jour, on vit apparaître dans le
village des gitans dont l’approche se fit les jours de marché et dans le porte
à porte quotidien.
Les produits proposés étaient de qualité, pâtisseries
orientales dont le fameux bras de gitan que tout le monde s’arracha et des
monceaux de dentelle de ainsi que du cristal de Bohême.
C’est ainsi que Maroussia, en ouvrant la porte en l’absence
de ses parents adoptifs, se retrouva nez à nez avec Soraya qui l’avait élevée
avec amour.
Elles tombèrent dans les bras l’une de l’autre et Maroussia
prit sur elle de la faire entrer.
Cléa et Aurélien furent heureux de ces retrouvailles car l’absence
de Soraya était l’unique nuage noir de l’adolescente.
Soraya expliqua que le campement avait été victime d’une
agression menée par un clan rival et elle avait choisi de placer l’enfant dans
un buisson après l’avoir endormie pour lui éviter une capture ou la mort.
Ensuite, ils l’avaient activement recherchée et c’est
récemment qu’ils avaient appris qu’une jeune fille d’une grande beauté
prénommée Maroussia vivait dans un village, suscitant l’admiration de tous par
ses talents artistiques et sa gentillesse.
Cette page du romancero gitan refermée, Soraya fit ses adieux
à la famille préférant pour la jeune fille une vie stable et heureuse plutôt
que les aléas de la route.
Elle promit de revenir prendre de ses nouvelles et laissa une
profusion de dentelles et des pâtisseries en signe de remerciement et d’amitié.