Dans un royaume bleu vivait une reine répondant au doux nom
de Pervenche.
Elle aimait arpenter les chemins de traverse de ses domaines
et récoltait les merveilles de la nature, fleurs, champignons, fruits des
buissons épineux dont on ferait d’excellentes confitures au château.
Un jour, elle entendit un chant mélodieux, elle chercha à l’identifier,
en vain.
C’était un oiseleur qui usait d’un pipeau pour piéger
ortolans, grives, perdrix et tout autre volatile destiné à figurer en bonne
place sur une table festive.
L’oiseleur avait des yeux émeraude qui scintillaient sous le
soleil, envoyant des ondes énamourées aux jeunes beautés qu’il rencontrait.
Dame Pervenche ne fut pas insensible à l’éclat de ses beaux
yeux et elle sourit, découvrant des dents de nacre.
Tous deux marchèrent de concert, l’oiseleur capturant au
passage des oiseaux dont il espérait tirer un bon prix.
« Je vous en donne le double, voire le triple, mon bon
ami si vous relâchez ces volatiles innocents qui ne demandent qu’à vivre ».
L’oiseleur ne put se résoudre à rendre la liberté aux oiseaux
capturés par la grâce de son pipeau et il baisa la main de la reine avant de
disparaître à l’horizon.
Une énorme tempête doublée d’une tornade blanche dévastatrice
éclata avec une telle violence que Pervenche dut son salut à un aigle qui l’emporta
pour la déposer sur les marches de son château.
Un déluge de feu et de glace et de pierres enflammées s’abattit
sur le royaume bleu et lorsque le calme revint, il ne restait de l’oiseleur que
son pipeau.
Une tourterelle la déposa au pied de la reine, signe d’un
monde disparu, cruel et peu enclin à s’incliner devant la beauté à l’état
naturel.
Dans les cuisines, on prépara un menu festif composé des
fruits et des tubercules récoltés dans les domaines bleus de l’île Royauté de
Dame Pervenche.
Les invités ne regrettèrent en aucune manière le sacrifice
des ortolans et autres oiseaux à la chair exquise et l’on se réjouit de les
voir voler en toute liberté, loin des rets d’un oiseleur pernicieux et cruel.