vendredi 31 août 2012

Pour Toi



Les larmes de la lune sont tombées sur tes cheveux, devenant opales et perles irisées pour faire briller ta chevelure maintenue par un catogan en pierreries. Quoi de plus beau que ma princesse rêvant au clair de lune, un grimoire magique formé de pétales de roses et écrit à l’encre impériale venue de la lointaine Chine, à la main ?
Pour toi, j’ai amoncelé des rouleaux de soie de toutes les couleurs, de grands sacs de riz parfumé et des lotus sous toutes les formes, en photophores, en ornement de paravents et d’éventails, en broderies de chemin de table alternant avec les buffles bleus des rizières. Pour toi, j’ai composé des poèmes, sonnets, ballades ou haïkus, pour toi, j’ai composé un roman d’amour où brillait à chaque page l’éclat de tes yeux, pour toi enfin j’ai décidé de m’intéresser aux mathématiques, arborant sur mon gilet l’araignée de notre prix Nobel.
J’aurais pu faire tant de choses pour toi mais hélas ! au moment où je venais enfin implorer ta clémence, tu t’enfuyais sur un chemin bordé de plantes vivaces, donnant la main à un homme qui n’avait pas cherché à rehausser son âme jusqu’à la tienne, étoilée et mystérieuse !

lundi 27 août 2012

Une histoire de Rose



Sur une feuille de bananier, une goutte de rosée s’est étirée pour devenir une splendide femme-fleur, épanouie aux rayons de la lune. La feuille s’est transformée en carrosse tapissé de lianes et de fleurs d’hibiscus et la nouvelle reine que chacun nomma Rose en raison de sa ressemblance avec cette fleur venue d’Orient parcourut son royaume, envoyant des baisers aux poètes disséminés sur le bord de la route.
Après un long voyage, le carrosse s’arrêta, les douze chevaux ayant besoin de souffler. Il était midi et un château sculpté dans les nuages se profila au terme d'une avenue bordée d’orangers et de citronniers. Dans un tourbillon de soieries, des suivantes vêtues aux couleurs de la Méditerranée accueillirent leur reine et la conduisirent à ses appartements.
Puis il y eut une envolée de colombes et d’oiseaux du Paradis et on attendit sagement la venue d’un prétendant qui demanderait la main de la belle représentante du royaume et il finit par arriver, arborant les couleurs de la pervenche et du muguet.
Il jouait admirablement de la harpe celtique et donna une aubade à sa belle, ses blonds cheveux cascadant au rythme de la musique comme il sied aux bardes. Et la suite ne peut être contée puisqu’elle relève de la plus stricte intimité.

mercredi 22 août 2012

Le cavalier de l'orage



Dans un fracas de tonnerre avec éclairs et grêle, le cavalier de l’orage a dompté son étalon pour avance sur les terres qui s’enfoncent dans la brume. Au détour d’un chemin périlleux, les tours d’un château se sont profilées, invitant le cavalier à faire une pause et laisser les habitants des territoires ravagés remédier à la destruction et aux trombes d’eau laissées sur son passage.
Une fois son cheval pansé et bouchonné, le cavalier a ôté ses éperons et s’est laissé guider dans la grande salle où flambait un superbe feu crépitant, découpant des silhouettes de princesses en ombres chinoises.
Des jeunes filles aux longues tresses relevées en chignons, chaussées de ballerines et vêtues joliment de costumes régionaux lui ont apporté sur des plateaux d’argent quelques mets savoureux accompagnés d’un bon vin de Cahors couleur cerise mûre et arômes profonds aux émergences de cassis, groseilles et mûres.
Il a fermé les yeux un instant, le cavalier de l’orage et c’est alors qu’une fée solaire est apparue sur le seuil de la salle d’apparat.
En un seul geste de la main, elle l’a réexpédié sur son cheval à l’autre bout de la terre pour dispenser sur la terre meurtrie les bienfaits de la chaleur. « Dieu soit loué, notre récolte est sauvée ! » ont murmuré les vignerons et c’est à juste titre qu’ils ont bu le nectar des 6666 pieds de vigne, à l’origine du vin merveilleux qui a eu raison du farouche et destructeur cavalier de l’orage.

mardi 21 août 2012

La belle aux cheveux d'or



La belle aux cheveux d’or a dansé un pas de deux avec son prince puis elle est partie, désabusée. Elle a ôté ses bagues et les a jetées aux quatre vents. Là où elle va, elle n’en aura pas besoin. Chaussée d’espadrilles et vêtue de lin bleu et de laine, elle marche vers le royaume de son destin. Jamais plus, elle n’incarnera le cygne blanc, ses pieds ont trop souffert des pointes Louboutin. Jamais plus, elle ne croira aux serments. Les hommes trahissent la parole où brille le mot « toujours » comme un diamant. Alors la belle a décidé de partir vers l’inaccessible mont où nichent, par myriades, les oiseaux bleus de l’amour, les divins messagers du naïf Pierrot à sa Colombine ; toutes ces ailes portent des mots doux, des mots fous qui deviennent des livres, magnifiques Tombeaux des écrivains à la plume duveteuse, comme celle des cygnes.

Le cadeau de Franklin



Dressé sur ses étriers, le chevalier du Roi va droit devant, suivi  par son escorte armée et décidée à en découdre avec l’ennemi que l’on devine derrière les meurtrières du château.
Son faucon sur le poing et sa hache de guerre sur l’épaule, le chevalier attend le moment propice pour débusquer l’audacieux qui s’approchera de trop près de l’échancrure de la muraille. Vif comme à la chasse, le faucon lui crève les yeux et repart triomphalement se poser sur l’encolure de l’étalon noir, plein de fougue et les naseaux en feu.
En seconde ligne, les guerriers se prennent à rêver du bon temps qu’ils se donneront une fois la bataille gagnée mais ils sont encore loin de la victoire et chacun ne peut s’empêcher de penser que certains reviendront sur leurs boucliers en guise de berceau funéraire.
Leurs femmes dénoueront leurs beaux cheveux en signe de deuil, on chantera leurs louanges et tout sera dit.
Mais Franklin au grand cœur, leur bien aimé chef, pousse son cri de guerre, terrorisant jusqu’aux loups qui se cachent dans les halliers et les chevaliers, le cœur vaillant, partent à l’attaque du château en s’en prenant aux murailles. Il y a toujours un défaut et Thibaut de Champagne, le spécialiste, découvre une encoche dans le mur principal. Le ballet des haches s’active, un pan de mur s’écroule et les jeunes partisans de Franklin s’engouffrent dans la brèche, tuant avec frénésie ceux qui ont le malheur de vouloir les refouler.
La lune resplendissante éclaira de ses lueurs dansantes la victoire de Franklin puis le banquet improvisé tandis que l’on jetait sur le sol de l’eau parfumée pour chasser l’odeur du sang.
Les dames les accueillirent comme il sied aux vainqueurs, se parèrent de bijoux et de belles toilettes pour remercier les seigneurs de leur avoir gardées en vie. Elles sourirent, dansèrent avec grâce et plus d’une se laissa séduire sans trop de réticence.
C’est ainsi que Franklin apporta à son suzerain un nouveau joyau, de belles terres et un château que l’on reconstruirait habilement jusqu’au prochain assaut.
La lune disparut derrière les nuages et Franklin ferma enfin les yeux, heureux d’avoir mené une belle bataille et gagné l’élue de son cœur, la belle Doriane aux yeux étoilés de points d’or.

lundi 20 août 2012

Ode à la forêt de Brocéliande



C’est un rêve et je valse à l’entour des vieux chênes dans la clairière des amants éperdus. Ils se sont rencontrés puis aimés. Une couronne de roses et de lierre a orné leurs cheveux et ils se sont enlacés dans le creux d’un arbre mort où nichaient des colombes. Des pousses ont jailli des racines, prenant au piège les amants du printemps.
Les rivières ont gelé, les sources ont tari et lorsque je suis arrivée dans ce paysage au clair-obscur étoilé, j’ai vu s’échapper, de son pas léger de biche, la fée de la forêt, un panier de baies et de fraises des bois à la main.
J’ai appelé le Dieu des Sources pour qu’il aide cette belle Nature à retrouver les ors de son feuillage et la présence sacrée du cerf blanc mais je n’étais pas de force à réveiller le dynamisme tellurique alors j’ai pris la position d’un gisant et dans un fracas de soleil, il est enfin venu, l’émule du bel Orphée pour rendre à la légendaire forêt la présence de l’Orient !  

dimanche 19 août 2012

La fée de la forêt



Le houx et le grand hêtre ont accueilli la silhouette blanche et dansante de la fée de la forêt. Un panier au bras, elle cueille des simples pour en faire des élixirs mais soudain un immense cavalier noir se profile à l’horizon. Il protège la fontaine de sa Dame ainsi que son château.
Au moment précis où la herse allait s’abattre sur la jeune femme démunie de ses pouvoirs en cet enclos privé, un oiseau bleu grippa le mécanisme et le château s’effondra comme une pyramide de cartes. « Vous avez toujours besoin de moi, ma mie ! » dit malicieusement l’oiseau en reprenant les traits de l’enchanteur Merlin et sans ajouter un mot, il enlaça la belle et l’entraîna dans son palais de verre pour l’aimer jusqu’à la fin des temps.

La ronde des âmes



Comme des papillons, les âmes volent autour de nous, légères et fragiles, prêtes à disparaître au moindre coup de vent. Moi qui suis à leur écoute, je les entends chanter. Leurs mots d’amour me touchent beaucoup car je sais que jamais elles ne se matérialiseront. Et pourtant ! N’ai-je pas vu dans un chêne, le regard ardent d’un poète disparu ? Ce petit pied fin, n’est-ce pas celui de la fée Viviane, se baignant à la fontaine de Barenton ? Et tous ces petits anges, ne sont-ils pas la sublimation des enfants malmenés, dans les guerres d’aujourd’hui ? Ils pleurent car ils voudraient retrouver le bon temps où ils jouaient et vibraient au son de la musique. Hélas ! Des monstres aux mains couvertes de sang les ont pris et sacrifiés pour servir d’exemple à la rébellion !
« Rendez-nous nos enfants ! » pleurent leurs mères mais il est trop tard. Les fées se chargeront de leur redonner une vie dans un lac enchanté qui servit jadis au plus grand chevalier de la Table Ronde, Lancelot du Lac.
Enfin calmée par cette issue digne des prêtresses d’Avallon, je retourne chez moi, à pas comptés, pour ne pas heurter un ange et lui ôter le désir d’aimer.

samedi 18 août 2012

Le prince aux yeux d'enfant



À l’orée des temps nouveaux, j’irai à contre-courant sur la frange du vent. Drapée de mousseline et de zibeline, j’ai attendu mon prince aux yeux d’enfant mais c’est le Morholt qui est apparu sur un drakkar d’argent. Il m’a contrainte à danser pour lui. Le front couvert de sequins d’or qui s’entrechoquaient au rythme de mes pas, j’ai interprété désespérément la fuite de tous les rêves.
Venus de tous les horizons, des cygnes blancs et des cygnes noirs m’ont confectionné une nacelle et m’ont emmenée bien loin sur un rivage hospitalier où m’attendait un palais de marbre, celui de mon enfance et là, j’ai rencontré celui que je croyais perdu, mon poète à la lyre d’amour et nous avons marché en direction du royaume bleu où dorment les étoiles.

vendredi 17 août 2012

Voyage au pays des Chevaliers



J’ai mis mes perles d’Orient, mon caftan turquoise et ma ceinture d’argent puis je suis partie, pieds nus, sur les chemins poudreux du rêve.
J’ai si longtemps marché que je suis arrivée au bord de la mer. Là, j’ai écouté le chant des vagues et je me suis mise à composer des poèmes sur le parchemin des épineux nichés dans les dunes puis j’ai attendu un signe du ciel. Il est arrivé sous la forme d’un voilier arborant la croix de Malte, celle de nos chevaliers, alors, sans peur, je suis montée à bord et nous avons suivi les étoiles et le chariot de feu.

jeudi 16 août 2012

Dans la mémoire du Temps



Dans la mémoire du temps, j’ai retrouvé ton beau visage, ton sourire lumineux et tes ailes d’ange. Je me suis inclinée, prête à te célébrer mais la grande prêtresse d’Avallon a jeté un voile de brume sur la toile et je me suis fondue dans le paysage.
Je me suis assise sur la margelle du puits et j’ai attendu la délivrance. Elle vint sous la forme d’un chevalier à la cuirasse d’argent, émule ou sosie de Lancelot du Lac, alors Guenièvre des temps nouveaux, j’ai demandé instamment à ce preux champion de la Table Ronde de me conduire en un ermitage pour me permettre de leur offrir la victoire aux ailes d’or.

mercredi 15 août 2012

Ode à Orphée



Nouvelle Eurydice, j’ai traversé le royaume des morts dans l’intention de retrouver mon bien aimé, Orphée à la lyre magique, capable de dompter les fauves et de charmer les sirènes, Orphée, mon bel amant aux yeux d’émeraude, aux mains étoilées et aux bras caressants mais lorsque j’ai aperçu, dans un éclat de lune, sa silhouette voûtée et son pas hésitant, je me suis emparée triomphalement de sa lyre et ne l’ai plus quittée