mardi 28 décembre 2021

La robe couleur du temps

C’est en ouvrant ses volets que la belle Aurore des Ajoncs découvrit, sur le rebord de sa fenêtre, un paquet enveloppé dans du papier de soie, élégamment maintenu par des rubans couleur de feu.

Intriguée, Aurore dénoua les rubans, ôta le papier de soie rose et s’extasia à la vue d’une robe de conte de fée.

Selon une épitaphe calligraphiée à l’encre de chine, délicatement posée sur l’encolure du corsage, il s’agissait  de la célèbre robe couleur du temps exigée par la princesse pour échapper aux avances incestueuses du Roi, son père, dans le conte Peau d’Ane.

Un carton d’invitation à un grand bal au château du comte y était joint avec ces mots : «  Que la perle de notre royaume se joigne à nous pour célébrer Noël » ! La signature, en script, était des plus mystérieuses : Prince Charmant !

« Voilà qui est singulier » se dit Aurore mais elle ne résista pas au désir d’enfiler la robe fabuleuse.

En se contemplant dans la psyché, elle se reconnut à peine tant la robe jetait un halo lumineux sur sa personne.

Un écrin contenant une parure de diamants était joint dans le colis.

Aurore découvrit des bijoux étincelants et elle se promit de participer à ce fameux bal pour découvrir qui était cet énigmatique prince charmant, si généreux et apparemment admirateur de son humble personne.

Elle rangea l’ensemble princier et se livra à ses occupations coutumières, en l’occurrence des travaux de broderie et de plumasserie. Son art était connu à mille lieux à la ronde et lui attirait de nombreux clients épris de beauté.

Alors qu’elle terminait un bouquet de mariée, alliant avec finesse des pétales de roses, de pivoines et des plumes de colibri, Aurore distingua le bruit d’un carrosse qui s’arrêta devant sa porte.

Une jeune élégante, vêtue de la robe couleur de lune de Peau d’Ane se présenta à la brodeuse comme l’émissaire du mystérieux Prince Charmant.

Elle proposa à Aurore de l’aider à faire ses bagages pour l’emmener ensuite au château où devait se dérouler la fête costumée.

Camélia, tel était son nom, se révéla être une excellente camériste et la malle contenant les effets indispensables de l’invitée, fut prestement chargée par les laquais à l’arrière du carrosse.

L’habitacle était confortable et revêtu d’un velours grenat tout à fait douillet et pénétrant.

Le voyage dura le temps d’un rêve, un manchon de zibbeline produisant un effet calorique propice au bien-être.

Une grande allée bordée de peupliers, d’acacias et de cerisiers s’offrit bientôt à leur vue.

Le château, en briques roses, décoré de licornes et de dauphins, apparut comme le but chimérique d’un voyage au pays du rêve.

Un homme d’une grande beauté, vêtu d’un pourpoint couleur soleil, se détacha avec brillance d’un cortège de jeunes personnes incarnant un personnage ou un héros de contes de fées.

Le chat botté portait fièrement sa rapière ornée d’un cabochon en rubis, Cendrillon faisait valoir ses admirables chaussures de verre assorties à sa robe de bal, la Belle au bois dormant, apparaissait dans la splendeur matinale d’un déshabillé en dentelles comme la créature immortelle de la beauté sans faille.

Des damoiseaux et des jouvencelles en tenue colorée, champêtre et chamarrée, maniaient des rubans avec dextérité pour qu’éclate une bulle de bonheur.

Un feu d’artifice accueillit l’arrivée de la belle Aurore et tandis que les laquais se chargeaient d’emporter sa malle dans la suite qui lui était réservée, la jeune femme accorda sa main au prince charmant déguisé en Roi Soleil.

Le prince la conduisit dans une salle où une table festive était dressée, éclairée par des candélabres.

Un repas composé de plats chauds à base de légumes, de bouillon de volaille et de crème épaisse donna à chacun un supplément d’énergie.

Crêpes Suzette, farandole de mignardises et pancakes à la marmelade d’oranges, accompagnés de carafons à l’eau de rose et du sirop d’orgeat mirent un point final à ce banquet destiné à briser la glace parmi les couples qui ne se connaissaient pas encore.

La table ôtée, un orchestre se mit en place et et au son d’une mazurka de Chopin, le bal s’ouvrit.

Le prince pria Aurore de lui accorder la première danse et chacun  admira ce couple si bien assorti.

La robe couleur du temps donnait à Aurore un air princier : elle surpassait en beauté toutes les merveilleuses créatures qui s’élancèrent à leur suite au bras de chevaliers servants de belle stature, avec une prestance sans égale.

Le prince charmant conduisit Aurore dans une orangeraie et c’est au pied d’un arbre chargé de fruits d’or qu’il lui déclara sa flamme : une promesse de mariage concluait ses paroles tendres et admiratives.

Sous le charme, Aurore accepta l’offre généreuse et répondit à une promesse de bonheur en rendant au prince son baiser d’amour.

vendredi 24 décembre 2021

Larme de Noël

Une larme s’est glissée dans l’étoile du sapin de Noël, lui donnant un scintillement incomparable et tu nous apparais, Bernard, pour nous rappeler que tu ne nous as pas tout à fait quittés.

Un Noël sans toi, cela paraît étrange pour ne pas dire incongru car tu ne manquais jamais de procurer  du bonheur, consacrant même intégralement ton treizième mois à l’achat de jouets inédits.

Je revois Jean-Noël, souriant et heureux dans son joli cygne à bascule ou sur la locomotive du train à sa taille, capable de faire le tour de la maison grâce à des rails bien étudiés.

Jean-Bernard découvrait toujours ses cadeaux avec l’émerveillement du lutin magique qu’il incarnait perpétuellement.

Hélas, ces jours heureux ont disparu pour briller dans la carte –mémoire des souvenirs.

Il y aura encore des cadeaux au pied du sapin mais tu ne seras pas là pour te réjouir de notre bonheur.

Une plaque souvenir destinée à orner ta tombe aura sa place auprès de mon pull brodé, mes livres, le cuiseur à riz sophistiqué pour tous et bien sûr, les jouets destinés à Eloan qui les découvrira avec un pincement au cœur en songeant à son cher Papi, toujours prêt à venir à son secours, même en déambulateur !

Une larme a diffusé le bonheur, offrant à toute la famille la présence du Pater Familias, irremplaçable et chéri à jamais !

samedi 18 décembre 2021

Une rose de neige

Une rose de neige s’est figée en mon cœur, cristallisant ma peine.

Des éclats de givre se propagent dans la carte-mémoire de mon corps, faisant jaillir mille et un souvenirs qui m’éloignent du tombeau où tu résides désormais pour me renvoyer les images de souvenirs charmants.

Je nous revois, à Sars-Poteries, village où nous avons scellé nos destinées, admirant au passage les créations artistiques des ouvriers verriers, des « bousillés » dont nous avons rapporté des reproductions.

Nous étions heureux, l’avenir était à nous et tu m’apparaissais si fort, si aimant que je t’ai tout de suite adopté, pensant, à juste titre, que tu serais mon rocher de Gibraltar, mon ange gardien, mon époux pour la vie enfin.

Même si nous avons dû affronter mille tempêtes, nous avons résisté et tout récemment, alors que tu étais miné par la maladie, tu me disais, le soir, en me serrant très fort la main « Nous sommes bien, n’est-ce pas » ? et j’acquiesçais sans l’ombre d’une hésitation : à mes yeux, l’essentiel, c’était que tu sois là, à mes côtés, m’apportant le réconfort et la protection.

A présent, je suis seule et je ne m’endors qu’en fixant ton image.

Une rose de glace s’est figée en mon cœur mais l’évocation de ton souvenir fait voler en éclats le givre de l’absence, te rendant la liberté de l’ombre qui croise tous mes pas.

Que la rose de glace renaisse au printemps, retrouvant le velours grenat de l’amour qui, jamais, ne se perd !

lundi 6 décembre 2021

Johnny et la rose blanche de l’immortalité


Johnny rêve de trouver la rose blanche de l’immortalité et lorsqu’il la devine, dissimulée dans les draperies de la nuit, il retient son souffle pour ne pas l’effeuiller.

Il s’approche d’elle d’un pas de danseur, celui de son héros préféré, le prince du Lac des Cygnes jusqu’à ce que la belle Sylvie, échappée des rives de la Maritza, le rejoigne pour un pas de deux inoubliable et immortel.

Johnny de notre jeunesse, de nos amours, tu règnes éternellement dans le ciel strié d’étoiles qui nous conduira vers toi grâce à l’étoile polaire, dans un cortège éblouissant de lumière pour qu’éclate à jamais le ballon rouge de nos amours.

Une pluie bienfaisante se répandra sur la terre et les roses blanches de l’immortalité fleuriront sur les rives des fleuves qui charrient des airs de blues, de charleston et de rock dont tu es le prince, pour toujours.

samedi 4 décembre 2021

Cerise aux lèvres de feu

C’est ainsi qu’on l’appelait, Cerise aux lèvres de feu car l’accroche-cœur de sa bouche incitait à l’amour et aux étreintes passionnées.

Mais un jour, alors qu’elle se livrait à un bel amant, sa bouche se fendit et laissa s’échapper toutes les pépites d’or qu’elle avait amoncelées depuis son adolescence vénale.

Voulant les récolter, elle fit une chute en avant, un malaise vagal lui dit-on à l’hôpital où elle se retrouva, blafarde, entre des draps blancs et amidonnés.

On lui refusa un miroir et elle dut se contenter d’une vie monotone, rythmée par des soins.

Elle avait été danseuse à Bali et le rythme corporel lui revenait par accès ce qui n’était pas sans inquiéter les internes chargés de son suivi médical.

Ils y voyaient une forme dérivée de la danse de Saint Guy qui augurait les prémices d’une démence précoce.

Cependant Cerise reçut un jour une visite qui changea le cours de sa vie.

C’était l’aumônier de l’hôpital. Il était jeune, avait les yeux bleus et des mains apaisantes.

D’une voix douce, il lui conta des épisodes de la Bible, l’histoire de Joseph et ses frères, celle de David et enfin la rencontre du roi Salomon et de la reine de Saba.

Elle reconnut dans ce personnage chamarré, désireux de connaître l’amour, un avatar de sa personnalité, diffuse et énigmatique.

Les transes attribuées à la danse de Saint Guy se raréfièrent puis disparurent totalement.

Son état de santé s’améliora considérablement et l’on put enfin lui présenter un miroir où elle contempla ce qu’elle était devenue, une quadragénaire tout à fait ordinaire sur qui aucun homme ne se retournerait dans la rue.

Elle se délivra de son nom de guerre, Cerise aux lèvres de feu pour retrouver une identité conforme à son image, Sœur Marie-Madeleine.

Telle la créature née sous les pinceaux de Georges de La Tour, sans bijoux, les cheveux courts, en robe de bure, elle partit en pèlerinage à Compostelle, entra dans un monastère et y resta pour toujours.

jeudi 2 décembre 2021

Où es-tu, Bernard ?

Où es-tu, Bernard ? Depuis que tu es parti, il fait nuit dans mon cœur.

Les blés mûrs de notre jeunesse ont été fauchés, l’automne flamboyant que tu aimais tant a donné tous ses fruits, laissant le froid s’installer graduellement.

Je m’inquiète à présent, à te savoir si seul, dans cette tombe fleurie que nos fils s’ingénient à entretenir pour que rien ne ternisse ton souvenir.

La course contre la montre a commencé et nous attendons à présent le marbre qui viendra habiller ta dernière demeure, la mienne également et celle de nos enfants, selon leur volonté.

Préserver l’unité de notre cocon familial, tel est notre vœu et notre souhait le plus cher.

Où que tu sois, mon chéri, je te rejoindrai car il n’est pas question que je te laisse seul, dans le froid et dans la nuit.

Nous serons ensemble, unis pour toujours, dans le champ des étoiles et nous retrouverons, avec les souvenirs multiples de notre vie, un peu de cette tendresse qui traversera le ciel à la manière d’étoiles filantes.

mercredi 1 décembre 2021

Entre ici, Joséphine !

 Le Panthéon s’est vêtu de lumière, de rose et de feu, pour accueillir la grande artiste résistante, mère d’une tribu arc-en-ciel et pour lui rendre hommage, les plus grands hommes et femmes célèbres se sont déplacés.

Cette artiste exceptionnelle à la voix chaude et ensorcelante, aux formes voluptueuses et dansantes, incarnation de tous les talents réunis, sens du spectacle, amour du Beau sous toutes ses formes, intelligence vive et tant de chaleur humaine et un amour inouï de la France, sera pour toujours notre phare, illuminant la beauté du cœur et la perle irisée d’une âme pure.

Entre ici,  Joséphine !

Ta place t’est réservée pour notre immense bonheur et notre reconnaissance !