dimanche 2 octobre 2011

Il était une fois une hirondelle



Par-delà les collines, une hirondelle s’est envolée, ivre de liberté. Elle voulait à tout prix faire mentir le proverbe selon lequel « Une hirondelle ne fait pas le printemps ».
À elle seule, n’était-elle pas le printemps ?
Elle piquait une tête dans le ruisseau des vallées, insouciante et légère. Elle était la dernière de la nichée à avoir franchi la barre des Pyrénées puis la mer mais elle avait compté beaucoup de petits cadavres sur l’écume des vagues.
Elle était la plus chétive mais elle avait survécu et elle avait l’intention de durer car cette vie était exceptionnelle et riche d’enseignement.
Elle choisit l’anfractuosité d’un rocher et s’y constitua un habitat de feuilles et de brindilles glanées au cours de ses promenades. Elle y mena la vie douillette d’une oiselle vouée au ciel et attendit que des compagnes la rejoignent mais il n’en fut rien.
Par contre, des enfants vinrent la voir et lui firent part de ce qu’on leur apprenait à l’école et la petite hirondelle grandit, pleine de savoir et de légendes contées par les grand-mères. L’hirondelle glissait parfois une observation qu’elle avait mémorisée au cours de son long voyage et les enfants, ravis, intégraient ces petits riens qui finirent par s’infiltrer dans la narration.
Leurs parents, admiratifs face à ces variantes, voulurent connaître leur amie mais les enfants, méfiants, refusèrent de les conduire au gîte de l’hirondelle. Chacun pensait aux plats qui portaient le nom d’hirondelle, nid d’hirondelles par exemple, ou de manière extensive le nom générique d’oiseau, brochettes d’oiseaux, œufs de mille ans.
Qui pouvait manger des ortolans, des pâtés de grives, des oiseaux sans têtes, pouvait aussi accommoder une hirondelle, fût-ce pour agrémenter un bouillon.
Les enfants se relayaient pour monter la garde auprès de leur amie.
Consciente de perturber la vie de ces enfants, l’hirondelle décida, un beau matin, de partir.
En pleurs, les enfants lui firent cadeau d’une écharpe bleu ciel brodée d’étoiles. Devenant ainsi un relais entre le ciel et la terre, l’oiseau merveilleux s’envola rapidement en exécutant les arabesques du mot Adieu.
Son voyage fut parfait car depuis ce grand départ une cohorte d’hirondelles savantes s’installe dans la grotte pour la plus grande joie des jeunes adultes qui n’ont pas oublié l’amie légendaire de leur enfance.  

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