vendredi 19 juillet 2019

La Fontaine de Barenton


La fontaine de Barenton
Le comte Louis avait offert à sa dame d’amour un magnifique attelage comprenant un réceptacle luxueux et d’un confort inouï.
 Blanchefleur se décida à entamer une excursion dans les environs car elle songeait souvent avec inquiétude à la personne qui avait écrit cet étrange message dans la chambre secrète et tout naturellement, elle jeta le dévolu, pour la destination, sur la fontaine de Barenton afin de suivre, à son tour, la piste indiquée.
L’attelage provoquait l’admiration de tous les villageois qui prenaient le frais sur leur perron, à la mode paysanne.
Le cocher portait une livrée or et argent qui captait les rayons du soleil et renvoyait à chacun un peu de ce luxe qui leur était étranger.
Près de la fontaine, l’attelage s’arrêta car le reste de la route se faisait à pied.
Blanchefleur mit des chaussures de marche et prit une canne pour se mouvoir plus aisément sur le sentier à peine foulé par des pèlerins adeptes des légendes bretonnes.
Elle posa sur ses cheveux un chapeau protecteur muni d’une voilette et elle partit d’un pas léger, à la conquête de son devenir.
Lorsqu’elle parvint aux abords de la fontaine, sa fidèle mésange sur l’épaule, elle fut arrêtée par un chant mélodieux. Un barde s’exprimait avec amour et intensité en s’accompagnant d’une harpe celtique.
Belle à la Fontaine
 Belle d’amour, mon enfant, ma tendre amie, je t’en prie, accorde-moi l’un de tes regards.
Plus belle que la fée Viviane, tu m’offres ton beau corps dont j’aspire les parfums.
Je te veux pour l’éternité, mon ange, ma beauté et je disputerai ton âme avec le diable car semblable beauté ne peut exister sur terre si le Malin n’entretient pas cette splendeur pour mieux se l’accaparer.
Que le bel aubépin s’exprime par ma voix et qu’il te ramène à la raison, ma douce aimée !
Le barde se tut et disparut dans un nuage de roses et d’aubépines, ne laissant de lui, près de la fontaine, qu’une harpe et des buissons de fleurs blanches qui contrastaient avec l’émeraude de la forêt.
Blanchefleur contempla l’eau de la fontaine et se vit comme dans un miroir.
Louis, son bel amant, se tenait à ses côtés et lui envoyait des baisers de sa jolie main ornée de bagues et de bracelets d’argent.
En voulant lui prendre la main pour lui renouveler son amour, Blanchefleur ne rencontra que la surface de l’eau qui se mit à bouillonner tandis qu’un grand vent soufflait, jetant à bas les feuilles qui formèrent un tapis végétal où se mêlaient de jolies aubépines.
Blanchefleur foula ce tapis royal et parvint, de l’autre côté de la fontaine, illuminé par un miroir de brume.
Elle franchit aisément cette barrière de perles d’eau et chemina jusqu’à un joli château de briques roses où elle semblait attendue.
Un majordome vint à sa rencontre, l’aida à se chausser de ballerines scintillantes et tous deux gravirent les marches d’un escalier majestueux.
Luths, mandolines et clavecin, grâce à des musiciens experts, firent entendre une aubade de bienvenue.
On lui fit prendre place dans un fauteuil confortable et Blanchefleur attendit que l’hôte des lieux se manifeste.
Il apparut enfin. Il était de haute stature. Sa longue chevelure bouclée était ceinte d’une couronne de laurier.
Il tenait à la main une harpe celtique et c’est en s’inclinant qu’il révéla son identité :
«  Merlin, pour vous servir, gente dame. Vous avez accompli ce pèlerinage pour entendre l’histoire de la Dame Blanche et vous la connaîtrez bientôt, foi d’enchanteur.
Patientez un peu et soyez ma dame en cette attente car j’ai dû user de mon dernier charme pour échapper à la prison de verre où Viviane me croit enfermé.
Adonnons-nous ensemble aux plaisirs de la terre, offerts en ce jour par notre belle Brocéliande aux mille et un secrets. »
Subjuguée, Blanchefleur suivit l’enchanteur et ils participèrent au meilleur des repas, œufs brouillés et galettes de sarrasin, pousses du jardin avec des fleurs de mauve, fromage au lait de chèvre et naturellement, les bons gâteaux au beurre, façonnés avec adresse par la cuisinière du château.
Des hanaps de boissons fraîches agrémentaient ce repas, simple et prodigieux à la fois.
C’est alors qu’apparut la plus ravissante des femmes, vêtue avec recherche et magnificence.
«  Dame Blanchefleur, permettez-moi de me présenter : Je suis Enora, celle que tous les amateurs de légendes connaissent sous le nom de Dame Blanche.
Je vais vous conter mon histoire et vous invite à passer dans le salon d’argent où vous serez plus à l’aise pour entendre mon récit. »
Et elle fit volte-face tandis que Merlin donnait galamment le bras à Blanchefleur pour la conduire dans ce salon réservé aux contes.


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