Jadis une petite sirène aimait se
reposer dans une crique car des amis venaient lui rendre visite. On lui offrait
des colliers de fleurs en harmonie avec ses beaux yeux bleus et pour ménager
son amour de la mer, on préparait des plats sans poissons, à base de riz, de
fruits et de légumes variés. Mais un jour, un voilier apparut à l’horizon, on
mit une chaloupe à la mer et tout changea. Les matelots lui rapprochèrent sa
nudité au lieu de la louer et ce fut ensuite une chasse à l’habitant et à ses
pauvres trésors.
On prit la petite sirène dans un filet
et on la remonta à bord du voilier pour en faire une servante.
Elle s’aidait de sa longue queue pour se
glisser sur le pont et se servait de sa chevelure pour le faire briller.
Le soir, elle était l’objet de quolibets
et d’avanies et elle songeait à mourir tant cette vie d’esclave lui devenait
intolérable.
Elle profita d’une ivresse collective et
d’un beau clair de lune pour se jeter à la mer en compagnie d’un banc de dauphins.
Revenue dans sa grotte, elle se jura de ne plus jamais se reposer dans la
crique, de peur de revoir ses tortionnaires.
Elle vivait calmement mais avait
beaucoup de peine à tourner définitivement la page de ses rencontres avec les
humains.
Elle finit par trouver un nouveau lieu
de vie, c’était une grotte bleutée et elle adorait s’y reposer dans l’attente
d’un événement agréable. Il lui vint un jour sous la forme d’un bel éphèbe aux
gestes caressants.
Leur amour se concrétisa par des
étreintes passionnées et ils connurent de tels moments de bonheur et d’extase
que la jeune sirène perçut enfin une activité intense dans son ventre arrondi.
Elle allait devenir mère ! Elle mit
au monde une ravissante petite sirène qu’elle prénomma Ornella.
Les apparitions du jeune père, se firent
rares pour disparaître totalement.
Melody, la jeune maman, se consacra
uniquement à l’éducation de sa fille.
Elle n’éprouvait plus le besoin d’aller
à la rencontre d’êtres humains et aimait raconter des histoires à la petite
Ornella qui grandissait en sagesse et en beauté.
Lorsqu’elle eut six ans, sa mère reçut
une visite extraordinaire : il s’agissait du dieu de la mer. Il avait une
haute stature et son trident servait à modérer une tempête ou à en déclencher
une si les hommes lui manquaient de respect. Il déposa auprès de la petite une
magnifique couronne d’or et une parure en perles fines. Ensuite il confia
l’enfant à une nuée de petites déesses marines aux longs cheveux étoilés de bijoux
en corail et en nacre.
Puis il ordonna à sa garde de fermer
l’entrée de la grotte derrière lui et c’est ainsi que Melody retrouva son bel
amant, l’éphèbe de la grotte bleue.
Il l’enlaça passionnément et ils
connurent à nouveau d’intenses moments de passion.
« Petite Melody, je ne t’ai jamais
oubliée mais j’attendais le moment propice pour faire mon entrée en majesté. Je
vois que tu es prête, c’est pourquoi je vais t’emmener dans mon palais en
cristal de roche et en quartz et là, tu vivras à mes côtés, une éternité
paradisiaque. Nous aurons une longue lignée d’enfants mais Ornella aura
toujours pour moi le parfum de l’aventure et de ton corps splendide et
virginal, glissant entre mes bras divins ».
Melody ne put répondre à cette
déclaration car elle connut à nouveau l’extase et la passion.
Un cortège se forma autour d’un carrosse
marin orné de coquillages et tout le petit peuple des sirènes applaudit la
belle reine qui partait pour connaître la gloire et l’amour.
Ornella suivait dans une jolie conque
nacrée, tractée par des hippocampes et elle riait aux éclats en assistant aux
pirouettes des poulpes malicieux.
En découvrant le palais grandiose qui
serait désormais leur habitation, la mère et la fille tombèrent plus encore
dans le bonheur intense qui serait définitivement le leur. Quant au dieu marin,
il enlaça à nouveau l’élue de son cœur et la conduisit dans une chambre bleue
pour l’aimer encore et encore tandis que la petite Ornella suivait une nourrice
aux longs cheveux pour s’entendre raconter une fois de plus l’histoire d’une
petite sirène qui n’avait pas eu sa chance et vivait un calvaire pour l’amour
d’un prince volage.
Elle promit à sa nourrice de ne jamais
chanter auprès d’un beau voilier et de fuir les princes qui n’étaient pas à
l’image de son père, honnête et passionné !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire