vendredi 29 novembre 2024

Fleur Désir

 




«  Mon amour, ma fleur des îles aux grands yeux turquoise, je rêve de plonger à la source de ton être pour en extraire le joyau rare, la Fleur Désir dont je respirerai toute ma vie l’incomparable parfum de santal et de rose ».

Ces mots ouvraient le livre du mystère dont Louis découvrait la trame romanesque en interrogeant son corps enfiévré.

Sa plume volait sur le parchemin et il était littéralement en transes.

Père Emile s’inquiéta un peu de le voir s’écarter du chemin de Damas puis il pensa avec sagesse que son filleul était un jeune homme et que tout amour conduisait à Dieu.

Rassuré, il excusa l’absence du romancier au séminaire sur Saint Paul qui touchait à sa fin en disant qu’une frénésie d’écriture lui était venue.

Le moment du départ se profila.

Par chance, Père Emile n’eut pas à prendre une douloureuse décision car Lilwenn le prit de court en lui demandant la faveur de garder auprès d’elle le jeune homme qui avait illuminé sa vie.

Les deux hommes se séparèrent avec émotion. Louis promit de donner de ses nouvelles régulièrement puis il partit, le cœur léger, vers l’hacienda somptueuse de sa promise.

Lilwenn lui avait préparé une suite confortable et propice à l’écriture.

Des liens se tissèrent au fil des jours.

Louis participait aux travaux quotidiens de la journée.

Afin de calmer ses ardeurs juvéniles, il seconda le jardinier, maniant la hache et la cisaille avec entrain.

Ensuite, les jeunes gens se promenaient, main dans la main, dans les environs dont ils devinrent bientôt les mascottes.

On aimait les amoureux dans ce pays cajun propice au rêve.

Louis et Lilwenn emportaient un carnet d’écriture et parfois, ils s’asseyaient sur un banc afin de noter les phrases vagabondes qui leur venaient au rythme de la marche.

Dignes émules de Jean-Jacques Rousseau, l’auteur des Rêveries du promeneur solitaire, ils allaient au gré de leur fantaisie, suivant les nuages ourlés de rose ardent.

Louis se procura les œuvres de Rabindranath Tagore, les dévora passionnément et réussit à trouver une harmonie en unissant le chantait d’amour qui grondait en lui à la manière d’un geyser et la sagesse conduisant à Dieu.

La trame de son essai amoureux ainsi fixée, il noircit de nombreuses pages le soir.

Fleur Désir put paraître en même temps que le livre de Lilwenn, le chevalier d’or, roman inspiré par l’homme dont elle était amoureuse.

Leurs œuvres croisées, à la manière de Louis Aragon et Elsa Triolet, emportèrent les suffrages des habitants de la Louisiane.

Assurés d’être faits l’un pour l’autre, ils franchirent le pas décisif en annonçant leurs fiançailles.

Père Emile fut enchanté. Il fit le voyage pour bénir leur union. Par ailleurs,  il félicita son filleul pour la qualité de son essai.

«  Quoique profane, il pourra être diffusé dans les diocèses et chacun reconnaîtra en toi le doigt divin posé sur ton front » dit-il avec émotion.

C’est ainsi que Louis et Lilwenn ouvrirent le grand livre de leur vie conjugale, heureux de s’être trouvés après avoir tant erré sur les chemins sinueux de la vie.

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