dimanche 8 avril 2012

Dans nos plaines blondes


Dans les plaines blondes de notre enfance, Annie, des champs de blé associés à la fête des Bleuets et les tartes à la cassonade, aux pruneaux et à la crème des Ducasses voguent sur des nuages roses à l’image de tes robes du Dimanche, Chantal arborant les mêmes avec fierté avec la cascade de son rire. Nous avions nos secrets, nos désirs d’ailleurs car la vie n’était pas toujours facile au sein de nos familles.
Je trouve merveilleux qu’une évocation féminine ravissante soit née de tes pinceaux car figure-toi, j’ai retrouvé une photographie de ma mère jeune fille et elle lui ressemble comme une sœur jumelle.
Ma mère est restée figée en 1925, refusant de voir que le monde évoluait.
Elle avait une représentation du monde frivole, à l’image de ses rêves de jeune fille qui aimait la valse et de jolies toilettes.
Mais dans nos plaines blondes, Annie, il y avait encore des chevaux et la mère de notre ami Alain qui était notre plus proche voisin servait de palefrenier après sa journée de travail à la fabrique de meubles Lambert au vernissage, le poste le plus difficile et le mieux payé.
Son mari était mineur de fond et à quarante ans, il était déjà cassé en deux. Il travaillait pourtant énormément, entretenant un magnifique jardin, élevant des pigeons voyageurs et dressant des coqs de combat en dépit des interdictions.
On pourrait écrire un roman à partir des habitants de notre fameuse rue qui fut, pour moi, un lieu très particulier. Il y avait trois petites filles, trois petites sœurs de cœur, Annie, Chantal et moi et puis il y avait les autres, à commencer par nos familles.
Ce monde était étrange et difficile à harmoniser. Il y avait ceux qui allaient à l’Église et ceux qui se faisaient un point d’honneur à renier la foi de leurs ancêtres et à dresser le poing gauche en chantant l’Internationale.
Ce qui me rassurait, c’était le retour inéluctable des moissons, de nos couronnes de bleuets et de nos rires d’enfants.
Dans nos plaines blondes, Annie, nous trouvions une forme de bonheur fragile, éphémère où se forgeait, comme une fleur redoutable, la tornade future de notre destinée.

2 commentaires:

  1. C'est trop trop joli et ça me rappelle plein de souvenirs, A nous deux, nous allons peut être pouvoir écrire le roman de notre vie, ...
    mais tu es mieux placée que moi pour le faire, tes mots sont une douce musique du coeur, et le mien y est particulièrement sensible puisqu'il s'agit de notre enfance. Tous nos souvenirs rassemblés dans un même livre, quelle ivresse !
    je t'embrasse ma petite Daisy. Annie

    RépondreSupprimer
  2. Trop belle aussi , cette Belle Dame du Temps Jadis ! Je trouve extraordinaire que nos univers se soient ainsi croisés. Tout pourrait commencer dans un roman par ton atterrissage dans les pivoines lorsque tu t'échappais par la fenêtre pour venir me rejoindre ! Oui, il y aurait tant à dire sur les personnes qui habitaient cette fameuse rue ,l'histoire de Jeanne Martin et de tant de personnes qui ont marqué notre enfance, les événements exceptionnels , Daniel Mézard pleurant la mort de Staline , l'arrivée de Joël Adrian qui nous fit prendre conscience du fait que nous étions tous des sortes de sauvageons en comparaison ! L'école de la vie , voilà ce que fut notre rue !Heureusement nous étions deux pour pouvoir affronter l'adversité !

    RépondreSupprimer