vendredi 17 septembre 2021

L'ombre de l'absent

 



Comme elle est à la fois pesante et légère, l’ombre de l’absent qui plane en permanence dans cette maison que tu as voulue et aimée, rompant avec tes attaches bretonnes et façonnant, au jour le jour, le rêve d’une habitation à l’aune de tes désirs.

En ouvrant les volets, j’entre de plain-pied dans le jardin dont tu as retracé les contours, faisant jaillir en moi, pour le décor de mes contes, le jardin d’amour où la dame attend, en lisant et en brodant, le chevalier de son cœur parti guerroyer dans un orient mythique dont il revenait, couvert de blessures et l’âme meurtrie.

Comme j’aimerais que tu reviennes, blessé et malade mais vivant !

Or je m’aperçois que ce vœu est impossible à réaliser et que, de plus, il est égoïste.

Nous t’avons vu souffrir la malemort pendant deux ans et nous avons cru naïvement que tu parviendrais toujours à repousser l’ombre de la mort qui s’infiltrait de toutes parts dans ton corps amaigri.

Tu as rendu le dernier soupir dans nos bras et c’est, pour nous, tes fils et moi, l’unique consolation face à ce choc terrible qui nous a frappés lors de ton départ pour l’au-delà.

« Deux étions et n’avions qu’un cœur » disait le poète François Villon dont on retient surtout, habituellement, des vers subversifs insufflant la révolte.

Certes, ce soir-là, quinze minutes avant l’heure fatidique de minuit fixée à Cendrillon par sa marraine, mon cœur s’est fendu en deux parties.

L’une d’elles est partie avec toi et cette moitié de cœur restante, il m’appartient de la faire battre encore jusqu’à ce que le destin m’appelle, pour te rejoindre, pour l’éternité.

 

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