Retour dans l'île des dragons

Emportant dans les soutes des provisions de bouche, quelques sculptures et un livre conçu à partir des parchemins enluminés brûlant d’amour, les princes naviguèrent avec ardeur, espérant trouver une issue favorable à leur destin.

En s’approchant de l’île, ils aperçurent des flammes et s’en voulurent d’avoir tant tardé à prendre la mer.

Leurs serviteurs les empêchèrent de débarquer, estimant qu’un grand danger pouvait les menacer. Cinq serviteurs qui avaient l’âme guerrière proposèrent d’aller en reconnaissance dans l’île qui subissait sans aucun doute les assauts d’ennemis malfaisants.

Bertrand, le plus aguerri de tous, jura qu’il reviendrait avec les princesses si leur vie était menacée.

«  Nous vous vengerons, seigneurs, si l’on a porté atteinte à leur intégrité et nous mourrons, l’épée à la main en criant votre nom si nous succombons sous le nombre ».

Sur ces mots, il prit la direction du groupe. Ils s’éloignèrent dans la brume cendrée générée par les flammes.

Le sable était brulant et ils progressaient lentement, les pieds enveloppés dans de larges feuilles contenant un onguent réputé pour combattre les brulures.

En s’approchant du palais, ils constatèrent que les dragons gardiens avaient disparu.

Où étaient-ils ces fidèles compagnons censés faire régner l’ordre dans le royaume ?

On n’en voyait plus trace.

Le cœur battant, les guerriers frappèrent à la porte du palais mais personne ne leur répondit.

Portant haut son bouclier, Bertrand poussa la porte de chêne qui s’ouvrit.

Tout semblait paisible. Les meubles n’avaient subi aucun dommage. Les chevaliers constatèrent que le palais était intact.

Il ressemblait à l’image qu’ils se faisaient du château de la Belle au bois dormant, à ceci près qu’il n’y avait personne.

Où donc étaient les princesses ?

« Ont-elles été enlevées ? suggéra Ogier, le bras droit de Bertrand. C’est tout à fait possible répondit le chef de l’expédition. Pour en savoir davantage, nous allons explorer le palais et ses communs de fond en comble ».

Ainsi fut fait et l’évidence leur sauta aux yeux : l’île des dragons n’était plus gouvernée puisque les princesses et leurs nombreux serviteurs avaient disparu. De plus, les dragons s’étaient littéralement évaporés.

Déçus de ne pas avoir de nouvelle rassurante à rapporter à leurs seigneurs, les guerriers firent le tour de l’île à la recherche d’un indice qui les mettrait sur la piste des disparues.

Aymeric, l’écuyer de Bertrand, fit une découverte qui leur donna une clef de l’énigme.

Plié entre deux roches, un tissu brodé montrait des dragons percés par des flèches. Sur l’envers de la toile, des silhouettes évoquant Myrtille et Myosotis étaient emmenés par des sbires vêtus de noir et masqués.

«  Nos seigneurs ont bien choisi leurs amantes dit Aymeric avec conviction. Grâce à ces broderies, nous les savons prisonnières. Où les a-t-on conduites ? Voilà ce que nos princes auront à découvrir ».

Avec l’impression de ne pas avoir été d’un grand secours, l’escorte mit la chaloupe à la mer pour regagner le voilier et offrir aux malheureux amants l’indice révélateur du drame.