mardi 25 février 2025

Le retour d'Alexandre

 

 


Alors que Rosemonde achevait son deuil et s’apprêtait à confier son pouvoir ducal à son fils Eudes avant de prendre le voile au couvent des Ursulines, on signala qu’un voilier avait mouillé dans une crique du royaume et qu’un chevalier ressemblant à s’y méprendre à Alexandre, son époux, avait mis pied à terre.

Rosemonde se fit confirmer l’identité du chevalier, quitta ses vêtements de deuil et revêtit une robe d’apparat pour accueillir son mari.

Elle pressa le cuisinier du manoir de préparer un repas fin digne de l’événement et attendit, un ouvrage de tapisserie à la main, que son époux lui présente ses hommages.

Après avoir salué la reine Bianca, le duc se dirigea vers ses terres, heureux de renouer avec les liens du passé.

Son aide de camp déposa au pied de la duchesse des cadeaux somptueux : rouleaux de soie, bijoux d’une grande beauté et tonneaux de poissons marinés, conservés dans le sel.

Le duc baisa la main de son épouse, lui passa au doigt une bague sertie de diamants et agrafa un collier de pierres précieuses taillées en étoiles autour de son cou.

Rosemonde remercia chaleureusement son époux, l’assurant que ces cadeaux somptueux passaient au second plan, son bonheur principal consistant en sa présence.

Portant fièrement sa toque au plissé impeccable, le cuisinier fit part de sa joie avec déférence et ordonna qu’une ronde de mets délicats et de la boisson festive soient servies au seigneur.

Après s’être restauré, Alexandre fit le récit de son aventure.

Il avait affronté une terrible tempête et s’était retrouvé sur un rivage inconnu, couvert d’ecchymoses et de mousse.

«  Une nymphe d’une grande beauté me ramena à la vie. Elle me fit penser à la nymphe Calypso qui avait envoûté Ulysse à la suite de son naufrage jusqu’à ce qu’il retrouve la raison et obtienne de sa geôlière d’amour l’autorisation de repartir vers Ithaque à bord d’un solide radeau construit de ses mains.

De mon côté, ma mie, je n’ai pas succombé aux attraits de la nymphe Océane car votre visage était toujours ancré dans ma mémoire. Océane ne s’en offusqua pas et fit de son mieux pour me rendre le séjour agréable.

Je lui rendais des services, coupant du bois, fabriquant arc et flèches pour tuer du gibier que j’apprêtais soigneusement pour la remercier de son hospitalité.

Gigue de chevreuil, gibelottes de lièvres, hure de sanglier, coqs de bruyère marinés furent souvent servis avec des préparations savantes où abondaient le miel, les fleurs et les plantes tubéreuses.

Océane était experte dans l’art du tissage, de la couture et de la broderie et elle eut à cœur de me fournir une garde-robe princière.

Comme j’envisageais de revenir vers vous, elle eut la gentillesse de confectionner, pour vous, des robes d’apparat que vous pourrez porter sans l’ombre d’un ressentiment.

Elle recevait de Chine et d’Orient des ballots de soie, de satin ainsi que des bijoux précieux dont vous avez un bel échantillon.

Elle commanda à un armateur un voilier pour que je vous revienne, sain et sauf ».

Un ange passa après ce récit et Rosemonde embrassa la main de son époux pour le remercier de toutes ses bontés.

Le couple fit une toilette soignée et lorsque les rideaux de l’alcôve furent tirés, ils connurent une nuit de retrouvailles si intense qu’une petite duchesse fut conçue et qu’elle porta, par la suite, le prénom d’Aurore.

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