Jordi le petit renne fugueur

Jordi , le petit renne fugueur

Alors que le père Noël vérifiait son dernier chargement de jouets et cadeaux en tous genres, Jordi, le petit renne qui devait prendre place à ses côtés dans le traineau pour se familiariser avec la distribution et le parcours établi avec soin par les équipes de lutins, profita de ce moment pour s’échapper et courir vers la forêt voisine.

Quand on s’aperçut de son absence, chacun s’alarma car on savait combien la forêt pouvait être dangereuse pour un petit renne isolé et dépourvu de ressource.

On le héla mais les appels restèrent vains car Jordi était déjà loin et il savourait cette liberté qui avait un parfum sauvage et familier à la fois. C’est là qu’il était né assurément et cette évasion n’était autre qu’un retour aux origines.

Lorsqu’il fut fatigué de courir, il chercha un abri où il pourrait enfin dormir sans être dérangé par les préparatifs de voyage du père Noël et de ses lutins.

D’énormes racines apparentes formaient un berceau. En y ajoutant des feuilles et des fleurs oubliées par la dernière tempête, Jordi se confectionna une jolie couchette. Il se blottit dans cet abri improvisé et s’apprêtait à s’endormir lorsqu’il vit passer au-dessus de sa tête et du pin centenaire qui l’abritait, le traineau du Père Noël.

Il éprouva quelque remords mais pensa qu’il avait bien fait d’échapper à la tournée des jouets qui régentaient le monde depuis tant d’années.

Cet engouement pour des objets inertes est plus ou moins insensé se dit-il pour justifier son acte de désobéissance.

« Je comptais sur toi pour m’apporter une poupée » dit une petite voix en réponse à ses pensées intimes.

Il découvrit alors une petite fille, en sabots, avec un long manteau de laine et d’extraordinaires cheveux qui cascadaient sur ses épaules.

On lui avait dit qu’un renne viendrait lui apporter un magnifique cadeau de Noël et, n’y tenant plus, elle s’était échappée pour recevoir au plus vite son cadeau tant convoité et espéré.

« Tu n’aurais pas dû t’échapper, petite, lui dit le renne. Moi aussi j’ai fait une fugue et je m’aperçois maintenant que c’était une erreur : nous sommes à la merci des loups et des ours et de tant de bêtes sauvages qui ne pensent qu’à manger ! Repose-toi un peu en te couchant contre mon flanc pour bénéficier de ma chaleur et au petit matin, nous nous mettrons en route pour aller chercher ta poupée. Elle nous attend et elle est si belle que tu la garderas toute ta vie »

Le lendemain, le renne et la petite Louison prirent la route qui menait à la maison du Père Noël où s’affairaient encore des lutins : ils peaufinaient de beaux jouets pour les enfants oubliés.

Louison découvrit avec joie la poupée qui lui était destinée : elle était merveilleuse, éclipsant toutes celles qu’elle avait pu observer en magasin, de l’autre côté de la vitrine.

« Prends la, petite, elle est à toi dit le renne avec tendresse ».

Fourbu et heureux de sa mission accomplie comme tous les ans à la même époque, le père Noël revint en sa demeure, le traineau délesté de tous les objets qu’il avait déposés çà et là, au cours de ce long voyage.

« Jordi, je suis heureux de te revoir. Je savais qu’une bonne action serait accomplie par tes soins c’est pourquoi je t’ai laissé t’échapper.

Sois la bienvenue, petite Louison : Tu es malheureusement orpheline mais si tu le souhaites, les lutins, les rennes et moi-même te serviront de famille.

Tu pourras rester auprès de nous et je crois que Jordi t’a déjà adoptée »

Ces paroles émurent la petite Louison qui, outre la poupée, reçut le plus beau des cadeaux, l’amour d’une famille.

Jordi se jura de ne plus jamais s’échapper, sauf en cas de service commandé et il veilla tendrement sur la petite Louison qui, en grandissant, devint une experte dans la confection des poupées à qui elle donnait une âme.

Joyeux Noël à tous !