samedi 24 avril 2021

Sous les pavés, la révélation

 



«  Si vous vous étiez adressés à moi, j’aurais pu vous renseigner en consultant les registres des mariages et des baptêmes » dit le père Anselme, presque taquin.

On trouva en effet dans les archives la trace du mariage d’Ange Donnadieu et de Rose Fabre d’Eglantine dans l’église Saint Michel de Fleur-Lez-Lys puis celle du baptême de Renaud Donnadieu.

« Qui les connaissait, demanda Jade et pourquoi les avoir oubliés » ?

Le père Anselme mentionna le nom d’une habitante du bourg, Jeanne Anglard, aujourd’hui décédée, qui était la marraine d’Ange Donnadieu, brigadier de la gendarmerie de Cassel.

Il avait succombé sous les balles d’un truand qui ne lui pardonnait pas de l’avoir démasqué.

Le mauvais sort s’acharna ensuite sur la famille, la maladie suivie de mort de la belle Rose et enfin l’alopécie de Renaud et son départ inexpliqué.

Petit Lotus d’Or désormais rendu à son état civil sous son nom véritable, Renaud Donnadieu, ne livra pas un récit à proprement parler mais s’exprima à la manière du Petit Prince de Saint Exupéry, sous forme de tableaux enfantins auxquels Albertine avec l’aide du psychologue de la gendarmerie donna un contenu qui devint une histoire.

Désespéré par le décès de sa mère chérie, Renaud s’inventa un ami pour faire face à la tragédie de sa vie.

Il avait beaucoup aimé un conte où apparaissait un buffle bleu, c’est pourquoi il n’eut aucune difficulté à faire surgir de son imaginaire cette créature légendaire qui lui promettait de lui rendre sa maman.

Il sortit de la maison et longea le cours d’une rivière où il supposait que le buffle bleu viendrait s’abreuver.

Il marcha longtemps et finit par arriver dans un domaine où vivaient des personnes désireuses de communier avec la nature et l’essence divine chargée de faire régner l’harmonie de l’univers.

On ne vit en lui qu’un enfant seul, désespéré et affamé. On lui donna une coupe de riz aux liserons d’eau et il but un grand verre de jus de fruits.

Il partagea une chambre avec un autre enfant, orphelin comme lui et il vécut désormais dans cette communauté dont il adopta les rites.

L’alopécie dont il avait été victime parut un signe divin au vieux sage qui dirigeait le monastère et lors d’une cérémonie, le jeune garçon revêtit solennellement une longue robe orange et il prit le nom de Petit Lotus d’Or car il semblait être le symbole de cette fleur sacrée à laquelle on donna le côté éternel du métal précieux.

Or, un jour, en se mirant dans une nappe d’eau claire où chacun venait se recueillir, il entendit à nouveau la voix qui l’avait conduit au monastère.

«  Mon cher enfant, tu dois te rendre à Fleur-Lez-Lys, près de l’église Saint Michel où ton père et moi, nous nous sommes mariés et où tu as été baptisé.

Demande à l’une des personnes de la communauté de t’y conduire. Dieu viendra à ton secours ».

La voix se tut et Renaud suivit les consignes données par la voix et c’est ainsi qu’il se trouva près du parvis de l’église et que la recherche de son identité véritable et de son histoire commença.

Ce texte constitué pour partie d’un récit et de l’autre des hypothèses du psychologue, corroborés par un témoin-clef, la personne d’obédience bouddhiste qui l’avait conduit jusqu’au village de ses origines, fut noté sur les registres de la gendarmerie et l’on sollicita l’entourage de l’enfant, à commencer par sa tante.

Sœur Marie-Myriam renonça à porter le voile, suivant ainsi les conseils de sa tutrice, Sœur Marguerite-Marie.

Cette dernière lui démontra que l’enfant avait besoin d’elle.

«  Vous pourrez revenir à Dieu lorsqu’il sera élevé et n’aura plus besoin de votre soutien » dit-elle avec tendresse à la novice dont elle se sentait si proche.

La voir partir fut pour elle une source de chagrin mais elle sentit son cœur déborder d’amour car elle pensait que cette décision était la plus adaptée à la situation et la plus juste.

Frère Maximilien offrit à Myriam un panier de victuailles, fromage du Mont-des-Cats, bière fameuse et divers produits du potager et du verger pour en faire cadeau au village qui avait si bien accueilli l’orphelin en état de désespérance.

Il n’oublia pas la communauté bouddhiste qui avait procuré à Renaud un moment de recueillement et de réflexion : c’est un colis de produits savoureux qui fut livré au monastère rédempteur.

Renaud embrassa sa tante avec émotion et la présenta fièrement à toutes les personnes qui étaient devenues ses amies pour la vie.

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