vendredi 23 avril 2021

Sur la piste du rêve

Sur la piste du rêve

Renaud attendait le retour de sa tante, sagement assis dans un fauteuil de rotin que sa mère affectionnait particulièrement et soudain, il vit apparaître une bête de légende, un buffle bleu aux grands yeux bruns.

La voix de sa défunte mère retentit alors dans la véranda :

«  Mon cher enfant, je suis la réincarnation de Rose Fabre d’ Eglantine au nom si bien porté. Grimpe sur mon dos et nous nous retrouverons dans un lieu consacré où nous fêterons nos retrouvailles ».

Renaud prit place sur le dos du buffle et tous deux partirent vers un monastère où l’enfant troqua son costume contre une robe couleur orange et devint Petit lotus d’or.

Au village de Fleur-Lez-Lys, bien décidé à percer le mystère qui auréolait l’enfant, Max reprit tous les éléments dont le groupe disposait et établit des corrélations rationnelles qui débroussaillaient le terrain.

Robe orange et alopécie exceptées, tous les éléments plaidaient en la faveur d’un enfant de type européen.

Petit Lotus d’Or était certainement un nom d’emprunt car le garçonnet parlait et lisait en langue française de sorte que l’on en déduisait qu’il s’agissait de sa langue maternelle.

Il n’avait aucun a priori concernant la nourriture et mangeait avec appétit les bons plats préparés par Jeanine.

Max lut des ouvrages de vulgarisation au sujet du bouddhisme afin d’y trouver les éléments essentiels.

Les livres de Matthieu Ricard, interprète du Dalai Lama lors de ses rares voyages en France, penseur philosophe, s’empilèrent sur sa table de chevet. Rien ne prédestinait Matthieu Ricard à vivre dans un ascétisme et un renoncement total à ce qui apparaissait aux jeunes gens de sa génération comme indispensables, vu qu’il appartenait à un milieu bourgeois, culturel, artistique et politique, représentant ce que l’on faisait de mieux dans la civilisation de ses origines et pourtant, il brisa les sceaux traditionnels pour se confondre dans un univers aux antipodes du sien.

 Max s’imprégna tant de cet univers qu’il lui sembla entendre la voix d’un hanneton, le soir.

«  Je suis bon pour vivre dans un ashram » se dit-il plaisamment.

Il se souvint que la romancière Elsa Triolet aimait entendre le chant des grillons le soir et cette similitude lui sembla de bon augure.

« C’est très certainement une histoire dont l’échafaudage mental est la clef du mystère » pensa-t-il.

Afin d’y voir plus clair, il se rapprocha de Jade et d’Albertine.

Aurore leur ouvrit sa maison des contes, invita Florian à se joindre à eux et elle commanda un repas raffiné et gourmand au restaurateur ambulant dont elle appréciait les prouesses.

Nuggets de cuisses de grenouilles, épaule d’agneau aux légumes cuits en tajine, rosaces de pommes aux myrtilles sur un socle de pâte sablée aux amandes constituèrent l’essentiel du menu.

Tout en faisant honneur aux plats cuisinés de manière artistique et gastronomique, les amis échangèrent les informations glanées lors de leurs recherches.

Albertine rapporta la disparition signalée d’un enfant à Cassel. Son nom, Renaud Donnadieu, éclata comme une sorte de révélation.

Le «  Bon Dieu ! Mais c’est…bien sûr » du commissaire Bourrel dans Les cinq dernières minutes, une émission culte des années cinquante, leur revint à la mémoire.

Jacky et Petit Lotus d’Or mangeaient un steak haché-frites et des beignets à la crème et au caramel dans la maison en pain d’épices après s’être livrés à un tournoi d’échecs.

Aurore écrivit sur le tableau de la pièce centrale le nom Renaud Donnadieu. Quelle ne fut sa surprise d’entendre des sanglots.

Petit Lotus d’Or se blottit dans ses bras et dit faiblement : «  C’est mon nom, c’est celui que mes parents m’ont donné avant de disparaître. Puis-je revoir ma tante Myriam qui doit se soucier de mon départ » ?

Aurore rassura l’enfant, demanda aux amis de terminer leur repas en toute quiétude et leur suggéra de les rejoindre au salon pour partager une pièce montée de choux au caramel et à la crème pâtissière, commandée pour le cas où la solution de l’énigme apparaîtrait à l’horizon.

La joie fut immense lorsque Aurore fit part des aveux de Petit Lotus d’Or.

On convint de ne pas le brusquer de peur qu’un nouvel élément perturbateur ne lui brouille l’esprit et ne lui fasse endosser une autre identité.


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