Les dernières roses

 

Les dernières roses

Elles sont parties avec les dernières roses, les chansons qui fleurissaient près des terrasses, au cœur des villes ou près des fleuves.

Elles sont restées sur les lèvres des amants avant de mourir tout doucement, note après note, en gardant le parfum des baisers.

J’ai conservé les pétales séchés en les répartissant dans mes livres préférés, la Bible, l’Iliade, l’Odyssée et les recueils des grands poètes qui m’ont aidée à vivre jusqu’à ce jour bordé de bleu et de rose indien.

Rebondissant sur les rubans de l’arc-en-ciel, les roses devenues fées ont décrit des volutes enchantées puis elles ont dressé dans une clairière du Val sans Retour une grande table où s’épanouissent des créations pâtissières : roses en crémeux, fondants de cœurs glacés sur coulis de groseilles et mignardises en boutons fluorescents.

Les chevaliers de la Table Ronde sont venus en invités d’honneur et ils ont partagé des hanaps de chouchen puis ils ont écouté les chants des bardes s’accompagnant à la harpe celtique.

Au doux nom de Chouchen, le nom prêté à sa dame d’amour, Georges Brassens a pris place à la table des servants de Brocéliande et il a créé une chanson où fleurissent ajoncs, genêts et boutons d’or couronnant la muse qui lui a inspiré tant de belles mélodies tandis que, de sa plume, il écrivait des textes ciselés sur des cahiers d’écoliers.

Puis la fée Viviane a fait une entrée remarquée au bras de l’enchanteur Merlin. Ce dernier a émis un vœu qui a délivré tous les chevaliers enfermés par Morgane.

Les couples légendaires, Lancelot et Guenièvre, Tristan et Yseult, Héloïse et Abélard, Fabrice del Dongo et Clélia à l’âme céleste ont rejoint l’aréopage chevaleresque qui festoie au nom de l’idéal et de la recherche du Saint Graal.

Les dernières roses ont fleuri, une ultime fois, pour célébrer la beauté de notre monde terrestre s’élevant vers les cieux.