La Dame de Pique

La dame de pique

Dame de pique ou dame de cœur ? Si j’ai croisé des joueurs de cartes dans ma vie, ils ne m’ont jamais élue comme leur dame de cœur.

Je les revois, plongés dans cet univers factice, prêts à troquer leur bien le plus précieux contre la carte maîtresse qui leur permettrait de gagner !

Gagner quoi au juste ? car s’il leur arrive de quitter la table de jeu en ayant raflé la mise, il leur arrive le plus souvent d’adopter la démarche du crabe pour rentrer chez eux, tâchant d’éviter ceux à qui ils devaient de l’argent.

Dans La dame de pique de Pouchkine, le héros devient fou après avoir cru à une martingale infaillible.

De nos jours, des joueurs se battent à distance et le côté étrange, c’est qu’ils dirigent un jeu singulier qui s’apparente aux grandes parties disputées sous la monarchie.

Louis XIV, à Versailles, imposait le jeu aux nobles qui vivaient à la cour. De cette manière, il les maintenait sous sa coupe et il se débarrassait ainsi des chiens fous qui auraient pu lui causer des ennuis politiques : enfant, il avait souffert de la Fronde et s’était juré de ne jamais connaître de tels dysfonctionnements.

Un seigneur de Trécesson était à deux doigts de perdre son magnifique château mais il fut sauvé par son valet qui lui glissa à l’oreille qu’il demeurait encore propriétaire du Pet d’Anon, nom dérisoire donné à un rocher qui n’avait aucune valeur.

Grâce à sa dernière mise dont chacun ignora l’aspect factice, il regagna une à une toutes les parties perdues et revint dans son domaine breton en se jurant de ne plus jamais effleurer un jeu de cartes !

Aujourd’hui, des savants se battent sur le tapis vert de la santé.

Certains audacieux font des annonces, abattent leurs cartes pour défier les joueurs réfléchis qui ne veulent pas se fier au hasard et qui comptent toutes les cartes sorties, cherchant celle qui recoupera toutes les lignes d’horizon pour apporter l’inestimable bien qui nous reste, la vie !