lundi 29 mai 2023

La créature des bois

 


Tandis qu’Ophélie s’ingéniait à ouvrir l’esprit de la petite Lola de toutes les manières, à la gendarmerie de Maroilles, on continuait à mener l’enquête pour connaître l’identité de l’enfant et en savoir plus sur la raison de sa présence dans la forêt de Mormal.

Des rondes avaient lieu dans la forêt : on recherchait des indices, des témoignages au hasard des rencontres.

Un jour, leur ténacité fut récompensée par une découverte : une femme en guenilles, au bord de l’agonie, gisait près d’un chêne.

Transportée aux urgences, elle décéda peu après. Son dernier mot « Lola » intrigua le lieutenant de gendarmerie et il y vit un signe du destin.

Un photographe d’art réalisa post mortem un cliché de la malheureuse. Grâce à d’habiles retouches, il effaça les stigmates de la douleur et donna à la femme l’apparence d’une personne en vie.

De cette manière, on put proposer aux habitants de Maroilles une photographie convenable voire attrayante.

Un homme la reconnut : «  C’est la créature des bois » ! On lui demanda de préciser le sens de la métaphore.

Selon ses dires, cette femme connue sous l’appellation « créature des bois » était une aubaine pour les hommes en quête de proies faciles.

Elle se pliait à toutes les exigences et ne réclamait rien en échange.

Des hommes avaient pitié de son dénuement et lui donnaient de l’argent ou lui offraient quelques babioles qu’elle acceptait  en toute simplicité.

Puis elle avait disparu, laissant les amateurs d’ébats érotiques pantois et déçus.

Un autre homme se souvint qu’avant de devenir la créature des bois, elle avait été une très jolie jeune femme, cultivée et pleine de charme. Un homme prestigieux lui avait promis le mariage mais le jour de la cérémonie, il ne se présenta pas à l’église.

La mariée délaissée, Aurore Esteban avait cisaillé sa jolie robe de dentelle qui s’était rapidement transformée en guenille et c’est à dater de ce jour maléfique qu’elle avait sombré progressivement dans la folie et la dépravation, devenant la créature des bois qui s’offrait à tous, même les plus repoussants.

Nantis de ces renseignements précieux, identité, dérive d’une femme frappée en plein cœur, les gendarmes fouillèrent les archives et firent parler le fichier informatique à partir de la donnée Aurore Esteban.

La mariée ne figurait pas au fichier et les registres de l’église où devait se dérouler la cérémonie ne portaient pas la mention de son nom.

Par contre, un renseignement précieux leur vint du médecin légiste qui avait pratiqué l’autopsie de la malheureuse : L’ ADN avait parlé. Cette femme perdue était la mère biologique de Lola.

Le lieutenant de gendarmerie, par courtoisie, convoqua Ophélie et lui révéla l’information en lui demandant de n’en parler à personne.

«  Il nous faut savoir, à présent, ce qu’a fait la présumée Aurore Estaban après avoir accouché de cette petite fille qu’elle n’a pas élevée pour une raison qu’il nous faudra découvrir » conclut-il.

Songeuse, Ophélie regagna Les Bleuets, décidée à choyer une petite fille aussi marquée par le destin.

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