dimanche 4 juin 2023

Un amant virtuel


Orlando Lespagnol, brasseur réputé à Maroilles, cachait un honteux secret : il avait feint le repentir et proposé une cuvée spéciale Aurore dédiée à la mémoire de la créature des bois qui lui avait donné tant de plaisir dans sa jeunesse mais en réalité, il n’avait jamais oublié les étreintes sauvages auxquelles la pauvre créature avait consenti.

Il ne s’était jamais marié et rêvait souvent d’Aurore.

Il créa un avatar Prince des bois et se manifesta sur les réseaux sociaux pour trouver la perle rare, celle qui lui ferait oublier Aurore et l’apaiserait.

Le hasard voulut qu’il croise les recherches de Lola, passionnée par l’arbre généalogique du comte Louis des Marches, son père.

Il l’avait suivie au cimetière et obéissant à une pulsion subite, l’avait chloroformée et entraînée dans sa voiture aux vitres teintées.

Lola se réveilla dans la suite luxueuse d’un château dont elle ignorait l’existence.

Orlando se présenta, le visage dissimulé par un masque vénitien. Il lui baisa délicatement les doigts, passa une main dans ses cheveux et sortit sans mot dire.

Une jeune servante lui apporta des mets savoureux, œuf en gelée, jambon de parme et pommes de terre sautées, moka et fruits exotiques, grenades, ananas et mangues.

Lola fit honneur à ce repas espérant que son geôlier lui en serait reconnaissant et la délivre au plus vite.

Orlando ne pouvait pas se résoudre à libérer sa belle prisonnière. Il aimait la regarder et lui caresser les cheveux, attendant que Lola réponde à sa passion.

La nuit venue, l’un de ses serviteurs allait fleurir la tombe des parents de sa bien-aimée car il ne voulait lui déplaire d’aucune façon.

Il ne pouvait se résoudre à étreindre passionnément le corps désiré de Lola comme il en avait usé avec sa mère. Il y avait en elle quelque chose de lumineux qui l’empêchait de passer à l’acte.

Chaque jour devenait une souffrance.

La situation aurait pu devenir critique si Bertrand Dutilleul n’avait pas eu la chance de croiser le prince des bois sur un réseau emprunté par des voyeurs en tout genre.

Il capta une photo de Lola, détournée par le dit prince, entourée de lys et de roses blanches comme les fleurs déposées au cimetière.

Il avertit la gendarmerie de Marchiennes de sa trouvaille.

Ayant eu vent d’une fouille prévue en son château par un indicateur à sa solde, Orlando fit déposer Lola dans le jardin des Bleuets où Ophélie s’empressa de la recueillir et de l’emmener dans sa chambre.

Le lendemain on fêta le retour de la belle disparue et on laissa Lola et le prince, le vrai, en tête à tête, pour une rencontre qui n’avait rien de virtuel.

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