mardi 11 juin 2024

Le fils de Madelon



  

Le duc Igor de la Baltique salua la venue au monde de son fils de cent coups de canon.

Il était si beau qu’on le prénomma Amour. Par chance, il n’avait hérité de son père que son impressionnante carrure.

C’était un enfant charmant, de nature joyeuse qui adorait sa mère, la suivant dans tous ses déplacements.

Il apprit à connaître les herbes de toutes natures et il pétrissait la pâte des pains et des tourtes que Madelon aimait confectionner elle-même à la cuisine.

Son père lui offrit un poney et il emmena l’enfant chevaucher à ses côtés, fier de sa beauté et de sa carrure de futur chevalier.

Or, un jour, alors que le duc chevauchait seul, désireux de vérifier le bon fonctionnement de son duché, il tomba dans un guet-apens.

Il en avait tant préparé à l’encontre d’ennemis que, comme tous les tyrans, il ne pensait pas que ce camouflet puisse lui être infligé.

Malgré sa force et son habileté au maniement des armes, il succomba aux nombreux coups assénés par des spadassins venus d’un territoire lointain où le renom du duc était lettre morte.

On rapporta son corps et chacun put admirer la défense du duc au nombre de coups qu’il portait sur chaque partie de son impressionnante ossature.

Du haut de ses six ans, Amour déplora la mort de ce père qui lui semblait intouchable.

«  Ne craignez rien, Mère, je suis là pour vous protéger et vous défendre. Je suis l’héritier du duché et je jure que, moi vivant, on ne touchera pas un seul cheveu de votre parure naturelle, Dame de Beauté » !

Ces paroles étonnantes sorties de la bouche d’un enfant émurent sa mère au plus haut point.

Elle embrassa ce merveilleux fils et regagna sa chambre d’un pas alourdi par une nouvelle grossesse.

Son époux l’aimait avec tant d’ardeur qu’il avait fini, malgré ses réticences, à lui faire don d’un espoir de vie qui l’attacherait plus encore à sa personne.

Quelques mois plus tard, Madelon mit au monde une petite fille qu’elle prénomma Virginie tant son visage évoquait celui de la Madone.

Très heureux de la naissance de sa petite sœur, Amour sentit son cœur bruler passionnément. Une autre dame à protéger, cela ne lui faisait pas peur car il avait l’âme d’un chef.

Il réunit les personnalités du duché et leur parla de telle sorte qu’elles furent impressionnées par la force qui émanait de sa personne.

Il leur demanda expressément de renouveler leur serment de fidélité envers le duché à travers sa personne, sa mère et sa sœur.

« Ma jeunesse impose naturellement que ma mère fasse usage du pouvoir qui me reviendra lorsque j’aurai l’âge de gouverner pleinement ».

Ces paroles prononcées avec calme et détermination s’imposèrent aux hauts personnages du duché qui donnèrent leur assentiment. Ils plièrent le genou devant Madelon et l’assurèrent de leur fidélité.

Madelon invita le conseil ducal à prendre place à une table qu’elle avait fait préparer.

Un repas fut servi qui réconforta les participants.

Bouillon de volaille, timbales de riz aux écrevisses, chapon farci de châtaignes et purée de topinambours, plateau de fromages, gelées de fruits et charlotte à la crème et au cassis firent les délices de chacun.

Madelon demanda l’autorisation de se retirer à la fin du repas car elle ne voulait pas laisser sa fille aux seules mains de sa nourrice Dorine, pourtant experte dans l’art d’élever les enfants.

Amour demanda à son sénéchal Dom Louis du Quesnoy de prendre sa place et il rejoignit sa mère pour assister au coucher de sa petite sœur.

 

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