mardi 16 mars 2021

Matthias alias Pierrot le Fou



Au Moulin Bleu, Matthias, dit Pierrot le Fou du fait de ses accès de colère, vitupérait contre le départ de son égérie dansante, la belle Marianne auprès de qui il jouait brillamment le rôle de Valentin le Désossé dans un Can Can  endiablé.

« Qu’est-elle allée faire chez cet elficologue du diable criait-il à qui voulait l’entendre. Nous avions tant de belles années devant nous avec des pièces d’or à  donner des crises furieuses à des bourgeois ! Un jour, son écrivain au petit pied ne fera plus recette et même son encyclopédie de prestige ne se vendra plus. Elle sera obligée de venir me manger dans la main et embrasser mes pieds, orphelins de sa beauté. Et moi, pauvre sot, je l’enlacerai de nouveau car je ne puis vivre sans elle ».

Un jour, lassé de n’entendre que l’écho de sa voix, il se décida à entreprendre une tentative d’enlèvement et prit le chemin de l’étang mystérieux.

Parvenu sur l’une des rives, il vit une belle jeune femme endormie et il lui vint alors une idée diabolique.

Il inséra dans ses lèvres cerise entrouvertes une pipette d’un breuvage dont il avait le secret. C’était un puissant hallucinogène qui provoquait des rêves fantasmagoriques.

C’est ainsi qu’Aurore eut l’impression d’être devenue une poupée et d’avoir à ses côtés un lutin charmant qui était fasciné par sa beauté et qui l’aimait profondément.

Un champignon hallucinogène qui entrait dans la composition de l’élixir avait établi le lien entre son désir d’enfance, ses souvenirs de petite fille et de sa poupée Boucle d’Or et tous les rêves nés de la lecture de la grande encyclopédie de Pierre Dubois.

Elle devint donc selon la logique des rêves une poupée vivant une extraordinaire histoire d’amour avec un lutin.

La chaumière féerique existait bien mais c’était une petite résidence que Matthias avait achetée pour aimer Marianne à volonté avant qu’elle ne lui échappe pour succomber aux charmes, inexplicables à ses yeux, de l’elficologue distingué.

Après avoir joué la comédie du lutin charmant et romantique, Matthias qui glissait toujours dans les bouillons et autres plats offerts à sa victime quelques gouttes d’élixir pour prolonger les effets de l’enchantement, passa aux actes et fit défaillir de plaisir cette femme qui se prenait toujours pour une poupée.

Pour raviver les flammes du désir, il joua le rôle du lutin blessé, inventant la légende du sac de perles pour se moquer de son rival.

Ce qu’il ignorait, c’est qu’un lutin qui existait bel et bien, avait une aventure amoureuse avec une sylphide et qu’il avait égaré un réticule de perles, ce qui provoqua l’embarras des enquêteurs, dans la mesure où l’étude des empreintes ne mena nulle part, les lutins ne figurant pas sur les fichiers de la police.

Le hasard voulut que Matthias fasse une mauvaise rencontre sur le chemin qui conduisait à Fleur-Lez-Lys où il comptait acheter des plats savoureux pour que se prolongent les étreintes avec cette femme mystifiée dont il appréciait, à présent, les charmes dévoilés.

Il reçut un coup de gourdin à la tête, comme dans le scénario inventé pour pimenter ses amours et il sombra dans un sommeil comateux.

Les enquêteurs qui entreprenaient de nouvelles fouilles le trouvèrent inanimé.

Une ambulance le conduisit à l’hôpital où on lui prodigua des soins diligents.

Il fut identifié et les soupçons se portèrent rapidement sur lui, au sujet de la disparition d’Aurore.

Quant à cette dernière, ne recevant plus d’élixir dopant, elle eut la surprise de retrouver sa taille initiale, ses vêtements d’origine alors que son bel amant avait disparu.

Elle ouvrit la porte de la chaumière et fit quelques pas avant de rencontrer Florian qui avait pris les devants puisqu’il connaissait l’existence de la garçonnière  de Matthias.

Très ému, il lui demanda pardon car il se sentait responsable de ses divagations autour du monde de l’elficologie.

Il l’emmena chez lui, lui servit du thé et des petits pains briochés.

Il téléphona à la gendarmerie pour que tous soient informés de la bonne nouvelle.

Albertine de Montmorency fut dépêchée pour recueillir ses premières déclarations. Elle agit avec tact et alerta l’hôpital pour qu’on réserve une chambre à une personne qui avait subi des outrages, à son corps défendant.

Des soins adaptés à son état furent prodigués à la jeune femme qui avait conscience d’avoir vécu des instants volés à son intimité, pour ne pas en dire davantage.

«  Il sera difficile de faire la part du rêve et du fantasme dit pensivement Albertine mais le rêve et l’irréel ne sont-ils pas le terreau de l’amour ?

Certes dit Florian mais plonger une femme dans un délire pour abuser de ses charmes relève de la criminalité ».

Ils tombèrent d’accord sur ce point et ils se séparèrent en attendant l’issue des investigations médicales et policières pour que chacun, et surtout la victime, retrouvent la sérénité.

 

 

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