dimanche 7 août 2011

De Ronsard à Colette

En relisant les poèmes de Ronsard, j’ai trouvé une perle rare intitulée tout simplement LA SALADE
« Lave ta main, qu’elle soit belle et nette,
Réveille toi, apporte une serviette ;
Une salade amassons et faisons
Part à nos ans des fruits de la saison. »
Bien mieux que Jean-Pierre Coffe, Ronsard offre en une centaine de vers les conseils avisés d’un écologiste du XVIème siècle : aller dans les champs chercher « la boursette touffue, la pâquerette à la feuille menue, la pimprenelle heureuse pour le sang, la responsette à la racine douce …. »
Magnifiant la qualité du produit et sa cueillette au sein d’une nature généreuse liée à l’amour, Ronsard, se référant à Ovide et à Virgile, nous conduit en musardant trois siècles plus tard à Colette qui découvre, enfant, l’inouïe profusion des cadeaux de l’Aube.
On déguste à chaque ligne la vie de l’écrivain intimement liée à toutes les saveurs, on rêve à sa propre enfance.
Un jeune prolétaire déplorait de ne pouvoir entrer dans l’univers de Marcel Proust, pensant qu’il fallait obligatoirement boire du thé pour comprendre la métamorphose de la madeleine … jusqu’au jour où il associa un petit beurre à une tasse de chocolat. Il lui suffisait alors de transposer un univers bourgeois dans le sien, empreint de coutumes ouvrières.
Colette Gourmande foisonne de détails culinaires et magnifie le travail quotidien de la femme au foyer. Parlant de sa mère Sido qu’elle adulait, elle la décrit ainsi : « Ses bras emmanchés de toile blanche disaient qu’elle venait de pétrir la pâte à galette, ou le pudding saucé d’un brûlant velours de rhum et de confiture ».
Au fil des pages, on s’aperçoit que la gourmandise, l’art de la table, l’histoire d’un produit relèvent pour Colette de la poésie la plus pure.
On suit l’auteur pas à pas, engrangeant des parfums et des phrases cristallines.
Les recettes favorites de Colette sont présentées en bouquet final.
Si je devais n’en choisir qu’une, ce serait La boule de poulet qui semble si aérienne.
La tourte de pain bis accompagnée de photos somptueuses nous laisse rêveur.
Il y a au moins pour un an de bonheur dans ce livre qu’on déguste comme un grand vin, à petites doses.
Les illustrations relèvent de l’art pictural.
Personnellement j’ai un faible pour la photographie où l’on voit Colette tenir deux chats contre elle (page 139). L’alignement de leurs yeux est saisissant. Nous nous sentons regardés.
La grande prêtresse du verbe nous incite à relire son œuvre. C’est bien ce que j’ai l’intention de faire.

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