jeudi 4 juin 2020

La légende du cyclamen

La légende du cyclamen
Dans Citrons Acides, œuvre dont la beauté me bouleversa lors d’un séjour professionnel à Marrakech, Lawrence Durrel, cet écrivain britannique amoureux du bassin méditerranéen, décrit sa découverte d’un champ de cyclamens fraîchement éclos, rappelant à l’auteur que la beauté est jumelle d’une certaine jalousie, enveloppant le cœur des hommes d’un nuage ourlé de couleurs paradisiaques.
Une nuit, je fus propulsée dans ce champ de cyclamens et l’une de ces fleurs magiques prit la forme d’une femme radieuse et éblouissante, à la robe de taffetas qui crissait au moindre de ses pas.
Nous nous sommes assises sur des rondins de bois et c’est après avoir pris une collation à base d’agrumes et de pâtisseries en pâte d’amandes, d’orangeades maison que la femme-fleur se décida à me raconter une légende.
Autrefois, les cyclamens étaient de fraîches jeunes filles que l’on invitait lors des mariages pour apporter une touche de passion langoureuse.
Se saisissant de tambourins, elles imprimaient le rythme de la danse qui suivait les évolutions du festin donné en l’honneur des jeunes mariés.
Mais voilà qu’un jour, un marié trouva l’une de ces beautés plus charmante que son épouse.
Il l’invita à danser plus que de raison et en sentant sa taille se plier et devenir une liane de désir, il perdit la tête et l’entraîna dans une chambre pour assouvir la passion dévorante qui l’embrasait.
Déçue de ne plus voir son mari à ses côtés, la mariée eut vent de cette folle équipée.
Elle se dirigea, sans mot dire, dans la suite nuptiale qui leur était réservée et d’un geste précis et irrémédiable, se trancha les veines, mourant d’amour trahi et de jalouse langueur.
Revenu à la raison, le mari volage déchira ses beaux habits de désespoir, en découvrant sa bien-aimée baignant dans son sang.  
La femme-fleur qui était la cause bien involontaire de cette tragédie se rétrécit jusqu’à devenir cette fleur délicate dont nous rêvons tous, le cyclamen !
Il en fut de même pour toutes ses consœurs et depuis ce temps, les cyclamens vivent et meurent dans notre cœur, au rythme de nos passions !

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