De retour de croisade où il avait subi de nombreux assauts et connu un grand nombre d’affrontements avec l’ennemi déclaré et désigné par son suzerain, le chevalier Gilbert de Beaumanoir avançait prudemment car il n’avait guère envie de lutter une fois de plus pour préserver sa vie.
Son cheval Onyx aguerri aux situations difficiles posait ses sabots avec une infinie prudence. En destrier fidèle, il se faisait fort de ramener le chevalier en son manoir sans dommage.
Avisant un petit bois doté d’allées bien dessinées, Gilbert de Beaumanoir flatta l’encolure de sa monture et lui indiqua une allée ombragée : « Nous pourrons nous reposer avant de reprendre la route » lui dit-il affectueusement.
Ils parvinrent dans une clairière où les oiseaux, les fleurs et les papillons offraient un aperçu champêtre des plus séduisants. Une fontaine jasait pleine de promesses rafraîchissantes.
Homme et cheval se désaltérèrent et chacun prit ses marques dans ce havre de repos.
Gilbert de Beaumanoir piqua un somme au pied d’un noisetier. Il rêva qu’il se trouvait dans un palais oriental ; on lui servait des dattes, du lait et des cornes de gazelle ainsi que des gâteaux au miel.
Lorsqu’il s’éveilla, il crut sentir sur ses lèvres un parfum de beurre, d’eau de rose et de miel.
Une jeune femme tout de voiles vêtue lui souriait ; elle lui présenta un plateau garni de gourmandises semblables à celles qu’on lui avait offertes en rêve. Il s’en régala, invitant la donatrice à l’accompagner, ce qu’elle fit gracieusement.
Un gâteau séduisit particulièrement le chevalier : « C’est un gâteau russe à la mode dacquoise, ainsi nommé parce qu’il est fourré d’amandes et de pistaches provenant de Crimée » lui dit la jeune femme qui répondait au prénom de Maroussia.
« Dès que vous serez rentré en votre manoir, noble chevalier, pensez à notre pays qui est harcelé par un voisin désireux de s’emparer de nos richesses par la force en invoquant des motifs fallacieux. Comme l’héroïne dont je porte le nom, j’arbore le drapeau de la révolte.
J’ai participé à tant de batailles que la seule vue du sang me révulse et j’aspire au repos. Mais puisque votre cause est juste, je ne puis me dérober. Dès que je serai en état de brandir la lance de combat, je partirai secourir votre pays, chère Maroussia » !
Sur ces mots, le chevalier se mit en devoir de reprendre la route, enfourcha son destrier qui hennit de plaisir.
Laissant derrière lui la source des enchantements et sa fée Maroussia, il se hâta vers son manoir, serra sa belle Louise dans ses bras couverts de cicatrices et goûta les délices d’un amour partagé.
Lorsque sa descendance fut assurée, il embrassa fougueusement son épouse et après avoir constitué une escorte de fiers guerriers, sella Onyx pour délivrer un pays en proie à des envahisseurs.
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