mardi 29 juillet 2025

Tornade et langues de feu

 


Après le départ du prince, Fleur de lune retrouva ses activités quotidiennes. Elle y ajouta des rites nouveaux auxquels Abdallah se pliait régulièrement, la méditation, la prière et la mise au net de petits écrits, généralement des poèmes ou des faits notoires du jour.

Durant ces moments de grâce, elle avait l’impression de renaître  et d’en ressortir vivifiée et grandie.

Alors que la vie s’ouvrait devant elle comme une avenue élyséenne, des oiseaux signalèrent un désastre imminent en s’enfuyant, poussant des cris inhabituels.

Une tornade se forma et s’abattit sur une terre qui portait déjà les stigmates de catastrophes.

Après un déluge de pluies violentes et de grêle, des langues de feu jaillirent des cratères endormis.

S’éclairant à l’aide de chandeliers, Fleur de lune ferma toutes les issues de sa maison. Elle se réjouit d’avoir préparé des plats qu’elle avait ensuite stérilisés en bocaux : elle aurait de quoi manger sans avoir à sortir.

Sa provision de pierres de lune, de coraux et de coquillages nacrés étaient suffisante pour qu’elle s’adonne à son art. Elle dessina de mémoire les langues de feu qui l’avaient impressionnée et, à sa grande surprise, l’une d’elles se métamorphosa en robot et sortit de sa feuille à dessin :

«  Je suis Melchior, avatar du Roi Mage dont je porte le nom. Le roi m’a chargé de vous apporter de l’ambre, cette essence rare qui provient d’Orient. Grâce à cet apport, vous pourrez donner une touche merveilleuse à vos créations » dit l’étrange créature d’une voix métallique.

Fleur de lune s’habitua à la présence de ce compagnon qui s’avéra utile dans les tâches quotidiennes.

Lorsque les éléments se calmèrent, Melchior proposa de partir en reconnaissance dans les alentours. Il en revint chargé de minéraux divers et de crabes de roche dont Fleur de lune fit un bouillon.

Le lendemain, équipée d’un ciré et de bottes, Fleur de lune explora la terre renouvelée.

Les cratères avaient disparu. De nombreux mollusques emplirent bientôt son panier. Les pierres de lune étaient rares. Par contre, des roses de cristal affleuraient aux roches. «  Voilà qui donnera un second souffle à mes bijoux » pensa la jeune femme et elle fut heureuse de voir Melchior s’emparer de ces merveilles sans les briser.

Bien chargés, ils rentrèrent à la maison. Fleur de lune activa le feu de l’âtre, débarrassa les mollusques de membranes non comestibles et prépara des bouillons dans la crémaillère. Elle disposa des aiguilles de pin dans une tourbière proche et y mit le feu pour flamber une éclade de moules. D’autres mollusques et coquillages furent savamment cuisinés et mis en bocaux pour remédier aux jours de disette.

Durant une bonne semaine, Melchior et Fleur de lune travaillèrent sans relâche, collectant les trésors venus de la mer ou naissant sur les rochers.

Cuisiner ces merveilles était une douce obligation. Les bocaux s’alignaient, promettant des jours de fête.

Melchior fit ses adieux. Il partit avec les nouvelles créations alliant les roses de cristal et l’ambre.

«  Le prince Abdallah sera enchanté de voir ces bijoux hors du commun » dit-il en partant.

Fleur de lune souhaita que le prince rencontre sa dame d’amour et se déclara honorée de voir ses bijoux rivaliser avec les parures en métal précieux.

Elle s’endormit en plaçant près de son oreiller une chevalière en jade finement ciselée qu’elle souhaitait offrir à celui qui deviendrait son époux.

 

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