mardi 4 juillet 2023

Le refuge des opprimés


Renouant avec la tradition de leur peuple ancré dans la croyance, les rescapés, conduits par la vieille Léonie à qui revenait le mérite d’avoir gagné la liberté en dupant le cruel Orson, se réfugièrent dans l’église Saint-Michel, le joyau de Fleur-Lez-Lys.

« Personne n’osera porter la main sur nous dans la maison de Dieu, assura la vieille Léonie. Seuls, les nazis ont rompu la tradition mais fort heureusement, ils ne sont plus de ce monde ».

Chacun prit sa place, les hommes à droite, les femmes à gauche et tous se recueillirent tout en reposant leurs membres fatigués voire endoloris.

Léonie prit la petite Elsa sous son aile  car elle avait entendu dire qu’Orson s’était permis des libertés sur sa personne.

Je l’ai mis hors d’état de nuire à temps soupira-t-elle et elle rendit grâce à Dieu.

Le sommeil s’empara d’eux et au petit matin, le bedeau les découvrit, recroquevillés et transis mais heureux d’être sains et saufs.

Le prêtre de la paroisse, Jean Desrosiers accourut dans la nef. Il proposa aux naufragés de la vie un hébergement dans la grande salle du patronage et il demanda à des fidèles paroissiens de préparer des lits de secours.

Une grande table comprenant du pain, de la confiture, du lait, du café et de la chicorée et une chocolatière fut promptement préparée.

« Avant de quitter cette église qui nous a si bien protégés proposa Manuel, le plus bel homme de la famille après Alfredo, du temps de sa splendeur, nous voudrions remercier le Seigneur de nous avoir apporté son aide.

Accordé, dit le prêtre en souriant ».

Alors les chœurs se formèrent et tous se mirent à chanter un hymne que Kendji Girac avait récemment remis à la mode «  Oh prends mon âme ».

Le refrain «  Entends ma plainte,  sois mon soutien » retentissait avec vigueur sous les voutes romanes de la vieille église.

«  Chez Marius » ouvrit plus tôt que de coutume. Le patron du café mit en route le percolateur et il commanda à son boulanger-pâtissier un surplus de viennoiseries, des cannelés et des tourtes à la volaille et aux légumes de saison pour un repas chaud destiné à toutes ces personnes qui avaient souffert.

Max accourut, demanda au maire de la commune, Claude Vonarx, de fournir des sacs de couchage, des couvertures et une cuisine ambulante qui permettrait aux familles de préparer des plats à leur convenance.

Sacs de riz, de sucre, de farine, bricks de lait, d’huile, de lait de coco, poulets, épices diverses, légumineuses et crudités seraient stockés pour que les naufragés de l’étang puissent en faire usage.

Poulets, quartiers de viande, fromages et conserves diverses furent fournis par les éleveurs et les fermiers du village.

Albertine ne fut pas en reste et, au sortir de l’église, elle prit quelques témoignages à la volée et mit en place un dispositif destiné à arrêter les bandits.

Le RAID fut sollicité au vu de la dangerosité de ces tristes personnages.

Apprenant que leur petite fille était saine et sauve, Alfredo et Romane se précipitèrent pour la serrer sur leur cœur.

Ils l’emmenèrent dans la maison des contes et lui prodiguèrent des soins et surtout de l’amour.

Elsa retrouva sa poupée Eglantine avec joie.

Elle avait eu l’idée de la laisser dans l’herbe pour que sa mère comprenne que son départ n’était pas anodin.

Des fourgons de police furent dépêchés sur les lieux pour mettre les bandits hors d’état de nuire.

Ces derniers n’eurent pas la force d’opposer une résistance nette car le savant dosage des somnifères à base de simples avait produit un effet à long terme.

On les mit en garde à vue et chacun se réjouit d’une issue carcérale plausible au vu de leurs méfaits.

«  Pas de bandit à Fleur-Lez-Lys conclut le vieux Léon et je demande que l’on adopte les familles d’opprimés et qu’on les intronise citoyens d’honneur de notre cité bien aimée.

C’est une excellente idée que je vais mettre en œuvre pour la proposer au conseil de ce mois dit le maire, venu boire un café. Je propose également que l’on ne les nomme plus « gens du voyage » car il y a dans cette métaphore une sorte de mise à l’écart et de sous-citoyenneté.

Voilà qui est bien dit, applaudit Jade et je vais écrire une série d’articles où nos amis seront mis à l’honneur.

Tout est bien qui finit bien » ponctua Maria, une habituée du café qui ressemblait de plus en plus à une sorte de mess d’état-major de l’amitié.

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