samedi 8 juillet 2023

Une habile plaidoierie


Son costume de marié en lambeaux, ses lèvres tuméfiées et un œil au beurre noir, Aurélien construisait une plaidoirie destinée au premier kidnappeur venu pour tenter d’infléchir sa décision.

Il poussa un gémissement étudié et vit venir un jeune homme, un adolescent sans doute, dissimulé sous une cagoule Mickey Mouse.

Stanislas, dit Stan, disparut rapidement pour revenir avec une éponge de mer et du vinaigre. Il épongea le sang séché, passa une pommade cicatrisante sur les plaies du prisonnier et lui proposa un jus de fruits qu’il but à la paille pour ne pas raviver les blessures.

«  Merci, jeune homme dit Aurélien. Je saurai tirer parti de ces bons soins lorsque je plaiderai en votre faveur au tribunal.

Je crains hélas qu’Orson ne vous laisse pas la vie sauve tant il vous déteste !

Raison de plus pour me délivrer car en devenant complice d’un meurtre, vous risquez la perpétuité.

Diable, perpète à mon âge, c’est la mort » dit Stan pensivement.

Aurélien profita de la brèche ouverte pour aligner des arguments solides destinés à faire de cet ennemi un allié, voire un sauveur.

Stan écouta attentivement l’as du barreau qui lui promit de le défendre s’il était arrêté pour complicité de séquestration. «  Je plaiderai un égarement dû à votre jeune âge précisa-t-il et je n’oublierai pas de mentionner les bons traitements que vous m’avez prodigués. De plus, si vous m’aidez à m’évader, ce sera la relaxe assurée ».

Pesant le pour et le contre, Stan finit par détacher le prisonnier.

Robuste pour son âge, il n’avait que quinze ans, il prit Aurélien sur ses épaules et choisit le moment où ses complices étaient attablés pour prendre la tangente.

Ils s’enfoncèrent dans un sous-bois et parvinrent près d’une chaumière dont Stan avait la clef puisqu’il s’agissait du logis de sa grand-mère.

«  Elle est partie en cure thermale. Personne ne la connaît dans mon entourage et l’on ne viendra pas vous chercher ici. Je vais repartir là-bas et feindre l’étonnement face à votre disparition. Pour être plus crédible, je m’assommerai avec une buche de bois, simulant une agression. Je reviendrai à la nuit tombée. D’ici là, ne bougez pas ».

Stan sortit et repartit vers la vieille bâtisse  pour mettre son plan en exécution.

Demeuré seul, Aurélien examina les lieux.

L’intérieur de la maison était pimpant et accueillant. La grand-mère de Stan semblait avoir disposé chez elle un panel de souvenirs.

La cuisine laissait entrer le soleil et donnait sur un jardin où la végétation était savamment entretenue.

Aurélien tartina quelques biscottes, prépara du thé et vécut ainsi quelques moments de réconfort.

La chambre d’ami était spacieuse, confortable et il se dévêtit d’autant plus rapidement que son beau costume était en lambeaux.

Il se glissa sous les draps et s’endormit, rêvant que sa douce Elsa le rejoignait pour vivre leur première nuit d’amour.

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