dimanche 23 juillet 2023

Ultimes révélations

 


Comme personne ne revendiquait le droit d’emporter le corps d’Ambre, Florian se proposa pour organiser les funérailles de la pauvre enfant.

«  Excellente idée dit Albertine. On dit souvent que, lors des obsèques d’une personne disparue de façon obscure, on peut glaner quelques informations menant parfois à la résolution d’une énigme ».

Florian choisit un bel emplacement dans le cimetière, commanda une pierre tombale en marbre noir, du Labrador et fit graver une somptueuse rose d’or afin de chasser à tout jamais le souvenir des roses noires maléfiques.

Un avis fut lancé dans Nord Matin : une messe serait donnée à la mémoire de la jeune morte.

Darius écrivit une homélie fort émouvante qu’il confia au prêtre. Le seul prénom d’Ambre apparut sur la pierre tombale avec la date supposée de sa mort.

La messe fut très suivie.

Sur les bancs que l’on avait réservés pour la famille et les proches, on vit apparaître deux femmes dont les cheveux et le visage étaient dissimulés par une mantille noire et deux hommes dont l’un semblait courbé par le chagrin.

L’autre, au visage dur, redingote sombre, chapeau claque et souliers vernis avait une prestance hautaine et un regard noir.

Jade qui avait consulté le listing des danseurs et inventorié le profil de chacun reconnut le maître de ballet Sacha Oulianov.

Il déposa une gerbe de roses noires près du cercueil et quitta l’église en marchant à pas reculés.

L’autre homme qui semblait brisé par le chagrin, s’agenouilla et pria longuement, des roses blanches ornées de perles pour ultime cadeau.

Interpellé discrètement à la sortie de l’église, il montra ses papiers d’identité, révéla qu’il était le prince Evgueni de Novgorod et qu’il se considérait comme le mentor et le protecteur de la belle Ambre au destin funeste.

«  Pourquoi n’êtes-vous pas venu au commissariat ? Nous aurions aimé savoir ce qui concerne la vie de cette jeune fille venue mourir tragiquement chez nous.

Je lis rarement les journaux et je ne savais pas que ma merveilleuse Ambre avait été retrouvée morte, au bord d’un étang.

Son absence ne vous avait-elle pas inquiété ?

Bien sûr je l’étais mais confiant en sa bonne étoile, j’imaginais qu’elle vivait une belle histoire d’amour et je ne voulais pas être indiscret ».

Satisfaite par les réponses fournies, Albertine se réserva le droit de l’interroger à nouveau si cela s’avérait nécessaire et elle laissa cet homme à son chagrin.

 Quant aux deux femmes, l’une avait les cheveux gris mais avait une certaine ressemblance avec la défunte et l’autre, droite comme un i était corsetée dans un chagrin muet, plein de reproches et d’inquiétude.

Albertine releva leurs identités et leurs adresses et les laissa aller en liberté. On les convoquerait au commissariat si besoin était, par la suite.

Max n’oubliait pas la parole de l’oracle «  Le cygne noir est la réponse » et il eut l’impression que le maître de ballet au regard froid pouvait être ce fameux cygne noir semeur de mort mais il lui fallait une preuve pour l’appréhender.

En se rendant souvent au bord de l’étang pour faire des relevés multiples et les crayonner avec précision,  Florian nota que les roseaux mettaient du temps à se relever, conservant l’empreinte du corps de la jeune fille.

«  Elle a dû être allongée au moins deux fois dit-il et la première s’est avérée pesante car de jeunes pousses ont été brisées. Un assaut amoureux, violent peut-être, s’est certainement produit. La pauvre enfant n’aura pas eu la mort douce qu’on lui aurait souhaitée, à défaut de la vie pleine d’amour et de la joie de la danse qu’elle méritait ».

Darius et Jade qui avaient beaucoup travaillé aux archives des journaux locaux avouèrent qu’ils n’avaient guère progressé dans le nerf de l’enquête à proprement parler. Ils avaient également lu des ouvrages ésotériques relatifs à la symbolique de la rose noire mais devaient reconnaître que cela ne les avait menés nulle part.

«  Nous avons travaillé et amassé de quoi écrire une thèse sur la rose noire mais nous n’avons rien trouvé de tangible qui nous mène à l’assassin » résuma Jade.

«  You houhou, les aminches ! j’vous apporte du matos et du lourd, cria Capitaine Marleau, fière d’apporter sa pierre à l’édifice. Le fameux Sacha est un être louche et il a sûrement une part de responsabilité dans la mort de la petite.

Il en était fou, lui faisait des cadeaux, l’emmenait dans sa voiture personnelle.

Apparemment, cet amour n’était pas réciproque mais Ambre n’osait pas repousser ses avances car sa place de maître de ballet lui conférait une autorité dont il abusait parfois lorsqu’une danseuse lui plaisait. C’est ce que m’ont dit de nombreux danseurs en se lâchant en fin de partie ».

Corinne alias Capitaine Marleau se déclara satisfaite de son apport et elle ajouta plaisamment qu’elle n’avait pas eu besoin de faire le moindre strip-tease pour glaner ces informations.

«  Finissons le puzzle » dit Roland avec enthousiasme et il corrobora les dires de Corinne, précisant, par ailleurs, qu’il avait fouillé la loge de Sacha et qu’il avait trouvé de multiples photos de la jeune Ambre, y compris un cliché pris au bord de l’étang.

La jeune fille avait l’air hagard, était dénudée et un manteau en plumes de cygnes gisait à ses côtés.

«  La voilà la preuve, cria Max ! Bravo Roland ! Tu as gagné tes galons. Il nous suffira d’aller cueillir ce danseur meurtrier à son domicile, «  Demain dès l’aube », fils, comme je te le disais récemment » !

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