jeudi 13 juillet 2023

Sacha le cygne noir

 


Sacha Oulianov quitta Moscou et le théâtre Bolchoï pour se rendre en France et créer un ballet dont la chorégraphie éclipserait celle de Marius Petipa et de Rudolf Noureev.

C’était un projet ambitieux mais lorsqu’il vit Ambre, il sut que son destin était tracé.

Coryphée de talent, il arborait une mine sévère mais lorsqu’il touchait du bout des doigts la danseuse de ses rêves, il se sentait pris de frissons. Sûr de sa beauté, il interprétait un cygne noir plus vrai qu’à l’ordinaire.

«  Le cygne noir ne peut pas être une femme, il n’aurait pas suffisamment de puissance, c’est un androgyne et je pense que cette dualité constitue le cœur symbolique du ballet, c’est un pendant de la rose noire, amour et mort à la fois » !

Ces paroles s’ancraient dans l’esprit de la danseuse dont les fouettés étaient d’une grâce singulière.

J’ai l’impression qu’il lit au fond de mon être pensait-elle et elle dansait avec amour en songeant à Evgueni, son mécène et l’objet de son passion.

Un sourire naissait sur ses lèvres que Sacha prenait pour lui.

Un soir, il la fit venir dans sa loge sous prétexte de lui donner quelques conseils pour le ballet de la première.

Lorsqu’elle entra, sur pointes, toute frémissante, il la prit dans ses bras, l’allongea sur son lit d’appoint et la couvrit de roses noires qu’il avait fait livrer pour lui dire son amour.

Très embarrassée, Ambre n’avait pas la force de repousser cet homme en qui elle voyait un dieu de la danse, elle se laissa embrasser mais son étreinte ne dupa pas le maître de ballet.

Lui mordillant les lèvres, il murmurait des mots fous.

«  Ma belle Anastasia ( c’est ainsi qu’il voulait la nommer désormais), tu seras mienne et nous danserons sur une chorégraphie que j’inventerai pour toi. Tu seras la plus belle étoile du monde ».

Ce disant, Sacha appuyait sa déclaration en la caressant de manière concentrique et méthodique.

Il l’explora totalement et l’embrassa avec une infinie tendresse.

Ensuite, il lui commanda de revêtir une belle tenue de ville.

Il l’emmena manger «  Chez Pierrot », où l’on servait une excellente cuisine du terroir. Pierrot se surpassait parfois en exécutant des présentations gastronomiques raffinées.

Caviar, champagne, croustade forestière, tournedos Rossini et Pavlova, pâtisserie légère créée pour les danseuses, se succédèrent.

Ambre se sentait envahie par une chaude torpeur.

Sacha proposa d’aller boire le café dans un petit village nommé Fleur-Lez-Lys, recommandé par le guide du routard.

En prenant place dans la torpédo pourpre de Sacha, Ambre ne savait plus si elle vivait un rêve ou un cauchemar.

Sacha la conduisit au bord d’un étang, la déshabilla lentement et lorsqu’elle fut entièrement nue, il la recouvrit d’un manteau fait en plumes et duvet de cygne.

«  Mon cygne d’amour, ma Léda, je te couvrirai de ma force jupitérienne au lendemain de la première et nous nous marierons selon les rites de l’église orthodoxe. Tu seras mienne à tout jamais ».

Ambre fut saisie de tremblements et Sacha la rhabilla promptement car à la veille de la première, il ne fallait pas qu’elle tombe malade.

Il lui fit boire le café promis en se servant d’une valisette sophistiquée qui contenait une bouteille thermos, des tasses, de la vodka et des verres filés or.

Ravigotée par le café et la vodka, Ambre se laissa envelopper dans un manteau de fourrure, de l’ocelot lui dit Sacha en précisant que rien n’était trop beau pour elle.

Il déposa la jeune fille devant son appartement et s’en fut en emportant le manteau de plumes de cygne comme trophée.

Ce manteau portait l’empreinte du corps de sa bien-aimée ainsi que son parfum et de ce fait, il était devenu l’emblème de son amour profond et de ses rêves les plus fous.

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