samedi 3 août 2024

Eudes le Valeureux

 




Parvenu à Saint-Jacques-de-Compostelle, le duc Eudes se retira dans un monastère des environs et il y vécut plusieurs années, priant pour le salut de son âme en espérant que sa vie trouve un sens spirituel.

Les hommes de son escorte attendaient patiemment que leur seigneur se décide à reprendre le chemin du retour. Ils s’étaient établis dans des auberges, se régalant des plats locaux et jouant aux dés pour tuer le temps.

Un beau matin, le duc leur fit savoir qu’il désirait regagner son duché.

Son château, Bellefontaine, niché en forêt de Mormal, près de Maroilles, la cité du fromage, lui manquait.

Eudes demanda à ses compagnons de préparer des provisions pour le voyage et d’acheter quelques souvenirs, chapelets, boules à neige, statues et images pieuses destinés aux serviteurs du château.

De son côté, il jeta son dévolu sur des objets précieux, vases, soupières et autres pièces de faïence , linge brodé et bijoux dont il se réservait la primeur.

Bien nantis, ils prirent la route, escortés par les étoiles du lieu sacré.

Lorsqu’ils parvinrent à la hauteur du château où le duc avait senti son cœur s’embraser, Eudes fut envahi par l’émotion du souvenir.

Il n’avait pas l’intention de faire halte dans le théâtre de ses tourments mais une étrange rencontre précipita son revirement.

Il aperçut une jolie petite fille qui cueillait des fleurs pour les offrir à sa nourrice. Cette dernière demanda à l’enfant de faire la révérence au duc. Elle apprit au seigneur que l’enfant, prénommée Blandine, avait perdu sa mère, la belle Gloria que tout le monde aimait. Gloria était décédée des suites d’une fièvre maligne.

La nourrice ajouta que le père de Blandine, Roland du Breuil, avait perdu la raison et qu’il errait dans le château en appelant une femme dont il n’avait pas compris l’irrémédiable départ.

Le duc se décida à présenter ses salutations amicales et endeuillées au prince Abdallah.

Le prince était très soucieux. La mort subite de Gloria, l’âme généreuse du château, l’avait frappé au cœur et il préparait son retour en Orient.

Il confia à Eudes qu’il emmènerait le chef Roland du Breuil pour que la médecine orientale produise un effet bénéfique sur son esprit en délire.

Que ferait-il de la petite Blandine ? Il redoutait de l’exposer aux périls d’un long voyage.

Eudes lui demanda la grâce de lui confier l’enfant.

«  Je lui ferai donner une éducation soignée. Elle sera la perle du Hainaut et lorsqu’elle aura atteint sa majorité, je l’élèverai au rang de duchesse et la doterai richement pour qu’elle prétende à un mariage heureux. Naturellement précisa-t-il, si son père retrouve la raison et s’il souhaite reprendre sa fille, je ne m’opposerai pas à sa demande ».

Heureux du devenir de l’enfant qui avait hérité de la légendaire beauté de sa mère, le prince remercia chaleureusement le duc Eudes et fit préparer les bagages de Blandine et de sa nourrice.

Pour familiariser l’enfant avec sa personne, le duc passa plusieurs jours en sa compagnie, jouant au bilboquet et au croquet avec elle, l’aidant à façonner des couronnes de fleurs et vêtir sa poupée Angélique de fabuleuses robes de soie.

Le prince fit construire un carrosse dont l’habitacle était adapté aux besoins de l’enfant et lorsque tout fut prêt, Eudes le Valeureux prit la route du retour à Bellefontaine, le cœur moins lourd puisqu’il emportait l’ardente flamme de son amour incarnée en Blandine.

On lui remit la bague qu’il avait offerte à Gloria et ce joyau servit à l’assurer que son amour avait pris un autre cours, se réincarnant dans une fillette aux yeux d’azur et au cœur immaculé.

Le voyage se déroula sans incident et c’est avec curiosité et intérêt que Blandine découvrit un nouvel environnement fleurant bon le parfum des prairies verdoyantes prodigues en fruits savoureux et en produits locaux fondant dans un palais capitonné par la douceur, riche de délicates papilles.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire