vendredi 16 juillet 2021

Chez Marius

 



Après le bol rituel de café-chicorée au lait cru et les tartines beurrées à la motte de la ferme voisine, Max se rendit au café « Chez Marius » afin de prendre le pouls du voisinage.

Heureux de revoir son célèbre client, Marius lui apporta un assortiment de macarons, de palets de dame et un chocolat mousseux.

En dégustant toutes ces douceurs, Max attendit que Marius, affairé à servir des bières et des verres de genièvre à ses habitués, soit libre pour venir lui tenir compagnie.

Marius s’assit sans plus de façon avec une théière fleurant bon le jasmin et servit Max qui accepta le breuvage en se disant que le patron lui apporterait peut-être un élément clef qui le conduirait à la jeune disparue. 

« Nous avons reçu la visite d’un journaliste, commença Marius. Il a pris beaucoup de photos du café et il a posé des questions aux clients qui n’ont pu le satisfaire car, en réalité, personne ne sait rien.

Ils tout de même réussi, à La Voix du Nord, à broder sur l’affaire qui, je l’espère n’en est pas une, en titrant : La mer de Fleur-Lez-Lys a encore frappé !

Ils nous ont présentés comme des sortes de rustres incapables de raisonner et de parler avec élégance ».

Max convint que ces journalistes n’avaient pas respecté la déontologie professorale qui leur imposait de vérifier leurs dires mais il souligna le bon côté des choses : personne ne savait rien au sujet de la disparition d’Astrid. Toutes les voies, y compris positives, étaient donc ouvertes.

Sur ces entrefaites, une jeune fille à l’éblouissante chevelure blonde pénétra dans le café.

Elle prit place en plein milieu de la salle, laissant un rayon de soleil jouer dans ses cheveux attachés par un joli ruban doré, à l’ancienne, ce qui lui conférait un air princier.

Elle commanda un cappuccino et quelques mignardises, notamment des cannelés qu’elle dégusta avec gourmandise.

Comme elle ne paraissait pas farouche, Max tenta de se rapprocher de cette émule de Vénus et profita du fait qu’elle avait sorti un petit carnet et un stylo plume or pour lui parler ainsi :

«  Rien ne vaut ces plumes, elles courent sur le papier comme si elles étaient dotées d’ailes.

Si vous les aimez, rejoignez-moi, je vous coucherai peut-être sur le papier glacé de mes souvenirs ».

Max saisit la balle au bond, la rejoignit en restant fidèle au thé au jasmin et ils devisèrent gaiement comme deux écoliers en vacances.

Le lendemain, il trouva près de son bol un exemplaire du journal Nord Matin dont un titre retint son attention : L’inspecteur Max Lambert est sur une piste !

L’article signé par une certaine Jade lui arracha un sourire.

Ainsi il avait été piégé à son tour.

Décidément «  Chez Marius » devenait une plaque tournante pour les pigistes de tous bords.

La Voix du Nord puis Nord Matin, à qui le tour à présent, pensa-t-il et en lisant l’article, bien écrit du reste, il découvrit, une fois de plus, que les journalistes se contentaient de broder sur mille riens qui ne menaient nulle part.  

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