mercredi 14 juillet 2021

Jocelyn de Rohan

 



Parti visiter ses domaines dans une île voisine, le duc de Rohan fut déçu d’apprendre à son retour qu’une bataille avait eu lieu en son absence.

Il fut l’invité particulier du banquet donné par le comte de Prunelé, savoura la prestation de la belle Aliénor et se dit avec une petite pointe d’amertume que décidément il y avait une page blanche sur le livre de sa vie, là où d’autres connaissaient de belles aventures.

Décidé à rencontrer l’amour, Jocelyn de Rohan parcourut la campagne, escorté par de vigoureux guerriers qui l’aideraient à abattre les bandits de grand chemin si d’aventure il s’en présentait et il fut particulièrement attentif au moindre bruissement lors des haltes auprès d’un feu de camp.

Il arriva enfin aux portes d’un château qu’il ne connaissait pas, sonna de l’olifant et déclina son nom et ses titres à l’hôtesse qui se présenta.

Invité à prendre place à sa table et heureux de se voir proposer une nuitée en cet endroit charmant, le duc demanda à se retirer dans une pièce réservée à des ablutions pour apparaître costumé et parfumé de frais.

Dame Anne des Merveilles s’inclina devant une telle demande car elle semblait être le signe d’un hommage à sa beauté.

Sa belle chevelure blonde cascadant sur ses épaules de guerrier rompu à tous les exercices de sa caste, le chevalier était si lumineux que son hôtesse succomba d’emblée à ses charmes.

Ils mangèrent et burent des préparations délicates et choisies et lorsque le repas fut terminé, Dame Anne proposa à Jocelyn de lui conter une romance de sa composition.

Le duc fut flatté par cette proposition et il se dit qu’il était le seul à avoir rencontré une conteuse qui soit également une dame de haut lignage, son blason orné de marguerites et sa devise en faisant foi.

« De gueules à une rose tigée et feuillée d’argent » : la devise était brodée au point de croix couleur or, ce qui lui donnait un cachet supplémentaire.

Dame Anne des Merveilles installa le duc dans un petit salon et commença ainsi sa romance.

Le Lai de Blanchefleur

Dans un château de neige, la belle Blanchefleur rêve en attendant le prince des Mille et Une Passions.

Son corps irradie l’amour. D’une blancheur nacrée, soyeuse au toucher comme les pétales d’une rose d’amour, comprenant une vallée prometteuse d’extase, sa belle nudité se tend sous les caresses promises et se love dans les dentelles, sous le satin et le plumetis de la garniture de l’alcôve dotée d’un ciel de lit où jouent les amours mythologiques, sous la forme de chérubins.

Quand le prince la serre dans ses bras, sa blonde chevelure s’épand sur la taie de l’oreiller et ses lèvres de rubis s’ouvrent pour recevoir les baisers.

Fou d’amour, le prince lui murmure des mots si doux que son corps se cabre et s’ouvre de mille façons, en épousant les formes veloutées et les parfums de la rose absolue dont elle est l’emblème.

Puis un nuage pourpre, ourlé d’un rose ardent, entoure les amants, les laissant seuls, dans l’intimité de leurs joutes amoureuses, sous la musique envoûtante d’un tambourin, aux accents rythmés d’une mélodie ancienne et sans cesse renouvelée.

Dans son château de neige, la belle Blanchefleur vous attend, princes venus de tous les horizons et assurément elle choisira le plus beau et le plus désirable, le plus passionné et le plus talentueux pour l’accompagner dans son jardin d’amour.

Dame Aude des Merveilles se tut et des anges passèrent.

Jocelyn de Rohan était sous le charme mais ses rêves ne le guidaient pas vers la Blanchefleur des nuages, il regardait Aude, au bord de l’extase.

Auréolée par le charme impulsé par le lai écrit sous l’impulsion des Muses, Aude bénéficiait de la beauté du chant qui se reflétait sur son visage.

«  Dame d’amour, lui dit doucement le duc de Rohan, mes rêves n’iront pas vers le château de neige où la belle Blanchefleur attend son prince, c’est vers vous, si vous le permettez, qu’iront mes soupirs passionnés car aucune femme n’a suscité en moi une telle passion et je ne doute pas d’éprouver un plaisir immense en découvrant les charmes de votre intimité si vous acceptez ma demande en mariage ».

Rosie par l’émotion, Dame Aude protesta par bienséance puis elle accepta le baiser du duc.

Tous deux s’en allèrent, enlacés, dans le jardin d’amour pour se donner réciproquement mille et une promesses d’une passion hors norme, fondée sur la magie des mots.

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