samedi 10 septembre 2022

Destins croisés

 

Destins croisés


Raymond Le Fur reçut la bonne nouvelle par des voisins de sa demeure squattée : son bien était enfin libéré de la présence des malfaiteurs.

Ils les avaient vus s’enfuir comme les voleurs qu’ils étaient au petit matin.

Raymond prit immédiatement contact avec une association caritative «  Demeure en péril » qui soutenait les personnes abusées en toute légalité.

Les démarches allèrent bon train. Les autorités habilitées à faire les premières constatations firent une première reconnaissance des lieux.

Le cadavre d’un chien gisait dans la cour et il était grand temps d’enterrer la pauvre bête en proie à la putréfaction.

L’exploration de la maison révéla que ses occupants n’étaient guère préoccupés par la salubrité.

Rideaux maculés, voire déchirés, sol recouvert par endroits d’immondices, vaisselle cassée, monceau de verres, d’assiettes et de couverts sales entassés dans l’évier, chambres dans un état douteux, tous ces relevés établirent la désinvolture coupable des occupants de la maison.

Un délai de trois mois fut jugé nécessaire pour rendre à la demeure son aspect originel.

La navette administrative alla bon train pour rétablir Raymond Le Fur dans son bon droit.

Redevenu propriétaire de son bien, Raymond Le Fur fut logé dans un établissement thermal afin de lui rendre la vélocité qu’il avait perdue.

Pendant ce temps, les trois indésirables se rendirent à Calais où ils se fondirent dans la masse des migrants qui avaient fait de cette ville chargée d’Histoire et de grandeur un dépotoir à ciel ouvert.

La mort de la reine d’Angleterre, Elisabeth II apparut à bon nombre de malfaiteurs comme un effet d’aubaine.

On pourrait se rendre dans le Royaume Uni en prétextant le désir d’assister aux obsèques. Le sacrement de Charles III, son successeur, ajouterait d’autres opportunités.

Certes, la police britannique serait sur ses gardes mais il serait possible de dévaliser quelques voyageurs esseulés, âgés et étourdis.

«  Les affaires reprennent » disait Lucien en se frottant les mains et dans l’attente d’un grand coup qui les mettrait à l’abri du besoin, ils profitaient de la générosité de la ville en détresse, mangeant d’excellents plats du cru, cuisinés par de bonnes âmes charitables.

Quant à Marguerite et Geneviève, elles coulaient des jours paisibles. Marguerite avait enfin trouvé quelqu’un à qui parler. Depuis son veuvage, elle était restée quasiment muette.

Tous les mots enfermés dans sa mémoire et dans son cœur jaillissaient avec la force abrupte d’un torrent.

Geneviève écoutait la vieille dame sans l’interrompre et lors du repos de son amie, elle écrivait la trame de cette vie de solitude et de méditation sous une forme romancée.

Le cahier à spirales acheté pour la circonstance se noircissait de notes et de chapitres qu’elle remanierait ensuite pour en faire un roman.

«  Si nous transformions la pièce principale en salon de thé » ? suggéra un jour Marguerite.

Elle précisa qu’elle se chargerait de la pâtisserie dans un premier temps puis elle ajouta que si les affaires marchaient bien, elles pourraient embaucher du personnel.

Geneviève trouva l’idée excellente et elle se mit en mesure de réaliser ce projet qui assurerait leurs moyens d’existence.

Les policiers chargés de l’enquête sur l’agression perpétrée par les trois malandrins se démenaient de leur côté, exploitant au maximum la piste tatouage qui leur avait été donnée par les victimes.

L’enquête minutieuse finit par produire ses fruits et l’on put établir l’identité des voleurs en passe de devenir des assassins.

Un lien fut établi entre Julien Laurilleux, dit Griffon d’or et le squat d’une maison particulière assorti de menaces proférées à l’encontre du malheureux propriétaire.

Contacté, Raymond Le Fur put narrer à nouveau sa misérable odyssée et il confirma la dangerosité des malfaiteurs.

Une brigade spéciale composée de policiers exercés au combat et de profilers habilités à découvrir l’identité et l’apparence d’êtres malfaisants même s’ils arboraient un visage nouveau.

Ainsi la trame du roman réaliste dont Geneviève des faubourgs était l’héroïne commença à prendre vie et se tourner comme les pages d’un livre qui s’avérait passionnant.

 

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