Le tournoi de l'amour

 

Le tournoi de l’amour

Fidèles à l’heure proclamée, les hérauts sonnèrent officiellement l’ouverture du tournoi qui s’annonçait sous les auspices de l’amour.

Dans la tribune d’honneur, les dames de haut rang arboraient des toilettes luxueuses. Chacune d’elles avait un ruban de soie à la main.

Lorsque les chevaliers se présenteraient à la tribune, ils recevraient de leur dame le ruban qu’ils porteraient sur le cœur dans le but de le rapporter avec la victoire.

Au moment où les deux premiers chevaliers se présentèrent sur le champ des lices selon un tirage au sort, un couple vêtu de noir dont le visage était caché par un heaume fermé et un voile opaque se plaça près des valets d’épée, formant un trait d’union entre la tribune d’honneur et l’emplacement réservé au peuple.

Le choc fut rude entre un écuyer de Dorian portant le ruban de Colombe et un chevalier dont le blason portait un lys d’or sur champ d’azur. L’issue du combat, longtemps incertaine, fut décisive lorsque les combattants s’affrontèrent à l’épée.

Roland de Beaumanoir, l’écuyer de Dorian, put enfin apporter à sa dame le ruban de la victoire et le chevalier défait se retira sous sa tente pour panser ses plaies.

S’élancèrent ensuite Florian de la Grande Motte qui s’était fait un point d’honneur à réclamer le ruban de la célèbre Céleste dont chacun vantait le dessert merveilleux et un chevalier puissant monté sur un cheval noir.

Florian faillit plus d’une fois mordre la poussière car son adversaire était doté d’une force herculéenne mais son agilité lui permit d’esquiver des coups qui auraient été mortels et lorsqu’ils mirent pied à terre pour s’affronter à la masse, la puissance du chevalier noir devint une faiblesse et son écuyer demanda la fin du combat en actant la défaite de son champion.

Le cœur de Louis des Roselières battit à tout rompre lorsque s’offrit à sa vue, face à lui, un chevalier dont la silhouette lui rappelait celle de Hubert de Hauteville. Le ruban de Maheut palpitait sur sa poitrine lorsqu’il s’élança bravement, lance levée.

Le choc fut rude mais aucun combattant ne vida les étriers.

Maheut tremblait de tous ses membres. Elle crut défaillir lorsque son champion vacilla sous un coup de lance bien asséné par son adversaire mais à ce moment-là, un nuage épais enveloppa les deux guerriers et personne ne put discerner la moindre phase de combat.

Comme il en avait le pouvoir, Dorian mit un terme au tournoi.

Les nuées noires empêchant la vision des coups portés, il était impossible d’arbitrer la correction des échanges. Le code chevaleresque était de mise et l’on ne pouvait, en aucun cas, déroger aux règles courtoises.

C’est avec un soulagement heureusement visible que Maheut vit Louis percer le nuage pour se jeter à ses pieds.

Personne ne vit Hubert de Hauteville quitter le champ des lices.

Il fut avéré que c’était bien lui et chacun se félicita de son départ.

Le banquet prévu eut lieu et lorsque le dessert magistral de Céleste eut été servi, Dorian annonça solennellement le mariage de Louis des Roselières et de Maheut des glycines.

Le couple mystérieux fit son entrée. Le chevalier ôta son heaume et tous reconnurent Edouard de Rochenoire.

Quant à sa compagne, lorsqu’elle enleva son voile, un vent de fleurs souffla dans la grande salle car l’étonnante Aurore des Tournelles apparut dans toute sa beauté.

Le couple bénit les futurs mariés puis disparut dans un tourbillon de fleurs qui rappelèrent à Maheut l’origine quasi féerique de son existence.

La journée se termina par une volte endiablée et un menuet romantique qui fit battre le cœur des amants.

Le tournoi de l’amour avait porté ses fruits et les rubans du rêve déroulèrent leur traîne de feu.