Relevant leurs jupons en un geste de défi, Cocotte, Garance, Velours, Fanfan et Crête d’or, la préférée de Roméo, le coq haut perché dans le prunier, affrontèrent la nouvelle venue, une poule Marans qui faisait valoir ses titres de noblesse pour avoir la primeur dans tous les domaines.
« Je peux pondre des œufs d’or dit-elle en relevant la tête avec morgue. Si vous voulez être mes servantes, je vous attribuerai un numéro préférentiel. Naturellement Roméo sera mon exclusivité : vous ne répondrez à ses appels passionnés que si j’y consens ».
Garance fit valoir ses droits d’ainesse et sa qualité de Coucou de Rennes :
« Une bretonne vaut bien une poule de la Venise Verte avec son angélique et ses marais. Moi, je suis née dans une péninsule qui résista à Jules César ; de plus, les chefs étoilés ne jurent que par la saveur inégalée de notre chair.
Des œufs d’or, la belle affaire ! Un œuf reste un œuf et les miens sont de qualité si j’en crois l’usage qui leur est réservé à la piperade.
Ne perdez pas votre précieux temps à vous quereller ainsi » émit sagement Roméo qui descendit de son perchoir pour faire la cour à chacune de ces dames, ébouriffant l’une, caressant l’autre de son aile et réservant son étreinte pour sa courtisane du soir.
Angèle, la propriétaire du poulailler, collecta les œufs du jour avec satisfaction, admira la belle entente du groupe et offrit une poignée de son meilleur blé en remerciement des services rendus.
La lune trouva ce petit monde endormi. Cléo, la poule Marans, rabattant son caquet conquérant, consentit à rentrer dans le rang.
Elle s’endormit en rêvant qu’elle deviendrait un jour la reine du poulailler.
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