Dans l’autocar qui la conduisait à Cambrai, Cassandre était pleine d’espoir : elle avait opté pour un cybercafé nommé Victoria , l’autre portant le nom d’Escape Game. Pensant que Lydie Herlem au vu de son âge devait être réfractaire à la langue et les us britanniques, elle avait penché pour Victoria symbole de l’élégance à l’ancienne !
Deux passagers conversaient et leurs propos visèrent tout naturellement le drame local.
« Elle n’est plus de ce monde, notre mascotte ! Savez-vous si la police est sur la piste du monstre qui a assassiné une si charmante vieille dame » ?
Chacun y alla de son mot mais rien de concret ne put être noté à part le fait que Lydie était connue de tous et qu’elle se rendait régulièrement à la grande ville pour y rencontrer peut-être son assassin.
Cassandre prit place au cybercafé Victoria, activa son mot de passe et balaya les informations fournies dans son domaine, la littérature chinoise.
Elle observait à la dérobée ses voisins d’écran, relevant ce qui était digne d’intérêt.
Son voisin, jeune élégant et policé la salua avant de partir en portant la main à son Borsalino. Cassandre le gratifia d’un sourire et reprit ses recherches, voyant tout à coup son nom s’afficher sur l’écran. Un anonyme mentionnait la qualité de ses travaux de traductrice, affichant notamment son enthousiasme pour Le Rêve dans le Pavillon Rouge dont il célébrait la beauté et la profondeur.
Cassandre fit une copie de l’article et sursauta lorsqu’elle fut interpellée par l’homme qui avait pris la place du jeune élégant.
« Dame Cassandre, je vous félicite pour la qualité de vos écrits et suis heureux de vous rencontrer en ce lieu. Sans doute êtes-vous à la recherche d’un indice qui vous mettrait sur la piste du criminel ayant sauvagement assassiné votre voisine ».
Interloquée par cette intrusion, Cassandre se contenta de poser un doigt sur ses lèvres pour rappeler à l’audacieux interlocuteur qu’ils se trouvaient dans un lieu où le silence était de mise.
Gênée d’avoir vu ses plans dévoilés au grand jour, Cassandre prit encore quelques notes puis elle ferma son compte et franchit la porte de l’établissement. Elle fut vite rattrapée par son voisin d’écran qui déclina son identité : « Agent Rex ! J’appartiens aux services secrets. Pardonnez-moi de vous avoir grillée mais je suis sur la piste du criminel et je ne tiens pas à ce que vous figuriez sur sa liste ». Il prouva son appartenance à la police et reconduisit la jeune femme à son domicile en empruntant son véhicule personnel, l’adjurant en la quittant de ne plus jouer les détectives.
« Nous avons affaire à un criminel dangereux et je ne veux pas entreprendre une enquête à votre sujet. J’ai fait poster des hommes dans votre propriété pour assurer votre sécurité ».
Sur ce, l’énigmatique personnage l’accompagna dans la pièce principale, visita toute la maison, claqua des talons et s’en fut en lui souhaitant une bonne nuit.
Désormais Cassandre renonça à ses investigations et s’en remit aux autorités compétentes.
Elle reprit sa traduction, la mena à son terme et prit ensuite la décision de continuer à fréquenter Frère Julien en lui offrant des délices gourmands à la mémoire de sa voisine et se rendit ponctuellement Chez Victor, savourant ses pâtisseries, ses pizzas et ses boissons parfumées.
Frou frou était toujours interprété pour la remercier de sa présence.
C’est Chez Victor qu’elle apprit l’arrestation du criminel. Sa photographie publiée en première page de L’Echo du Nord, le journal local, l’interloqua ; elle reconnut le jeune homme élégant au Borsalino qui lui avait presque fait chavirer le cœur !

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